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Bernard Jomard-Le renseignement économique en question

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Hier, pour conquérir  de nouveaux marchés, c’était relativement simple : les “services” ouvraient les valises diplomatiques, faisaient du renseignement économique et aidaient les entreprises nationales à conquérir des marchés en évinçant leurs concurrentes, cela particulièrement pour les projets d’infrastructures, d’énergie ou d’aéronautique.

Mais aujourd’hui avec la focalisation des services sur la lutte contre le terrorisme, la diplomatie dite « d’affaires » a été un peu oubliée et on a un peu délaissé les activités d’intelligence économique. Il serait bon de rappeler que les pays n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts.

France

Le déficit commercial de la France, qui navigue entre 45 et 75 milliards d’euros depuis 2003, aurait peut-être été limité si la France avait mieux anticipé l’évolution technologique du monde, dont ce Software Power producteur de « Renseignements » et qui déploie des capacités uniques de collecte et de traitement de données de masse ou data.

Précisons néanmoins que la France dispose depuis 2004 du SISSE (Service Information Stratégique et de la Sécurité Informatique) qui assure le pilotage interministériel de la politique publique en matière de protection et de promotion des intérêts économiques, industriels et scientifiques de la Nation.

Mais ce déficit semblerait démontrer qu’on est resté au fameux « doux commerce » de Montesquieu. En fait, une guerre économique farouche s’intensifie sous nos yeux, une guerre sans mort apparemment, et pourtant une guerre à mort. L’Europe, dont la France, est en guerre, mais elle fait semblant de ne pas le voir.

Europe vs États-Unis

Les Américains ont eux, depuis 2001, une « advocacy policy » qui s’appuie sur « l’advocacy center ». Cela leur a permis de renforcer leur dispositif de compétitive intelligence, d’abord discrètement sous Obama puis plus ouvertement sous Trump. D’après certaines publications, 40 % de l’arsenal de renseignement US serait mobilisé dans l’intelligence économique au travers de leurs programmes Echelon et Prism.

Ce renseignement économique américain mobiliserait 14 agences gouvernementales, dont la NSA.

Notons aussi que l’application assez invraisemblable de l’extraterritorialité du droit américain a affaibli de nombreuses entreprises. Cette loi basée sur le combat antiterroriste et la lutte anti-corruption est de plus en plus utilisée pour le respect des embargos américains. Une extraterritorialité qui se propage à la faveur de l’abandon du droit international, et de la négation de l’Europe. Elle constitue un élément majeur de la stratégie de « contrainte globale » qui assoit la stratégie des États-Unis.

Europe vs Chine

La guerre économique avec la Chine, pays pas encore considéré par l’OMC comme une économie de marché, se résume pour le moment à des crédits bonifiés délivrés par des banques publiques, et à des aides déguisées de l’État. Une Chine qui utilise tous ces outils pour continuer à faire tourner à plein régime sa machine à exporter.

La Chine garantit aussi chaque année plus de 250 milliards de dollars de crédit export, soit trois fois le montant garanti par les pays de l’OCDE. Crédits bien évidemment liés à l’origine chinoise des produits exportés.

En novembre 2017, Les États-Unis ont continué à s’opposer à l’octroi à la Chine du statut d’économie de marché, cela a permis de maintenir des barrières douanières élevées sur certains produits chinois.

L’Europe a néanmoins accumulé 1 400 milliards d’euros de déficit au cours des dix dernières années, soit près de 1% de son PIB. Depuis ce grand projet chinois de nouvelle « route de soie » les exportations occidentales vers les pays traversés ont, elles, chuté de 130 milliards d’euros. Enfin, en Afrique, la Chine capte aujourd’hui près de 30% des marchés publics.

On avait imaginé que l’émergence de cette Chine centralisée et cohérente serait bonne pour les économies occidentales, on peut douter de plus en plus de cette affirmation

Russie vs Europe et/ou USA

On a connu une forte intensification de la guerre économique depuis la crise ukrainienne, une guerre manipulée ou pas. Crise qui débuta en novembre 2013 à cause de la décision du gouvernement ukrainien de ne pas signer l’accord d’association avec l’Union européenne. Ce fut le déclencheur de ce mouvement visant à éloigner l’Europe de l’ouest de la Russie.

En réaction, la Crimée proclama son indépendance et vota pour son rattachement à la Russie.

Enfin, on retrouve souvent le secteur énergie derrière les conflits économiques. Rappelons donc que les États-Unis, déjà leaders de la production de gaz, sont également devenus le premier producteur de pétrole au monde. Selon la compagnie British Petroleum (BP), la production américaine s’élève désormais à douze millions de barils par jour (mbj), contre onze millions pour l’Arabie Saoudite.

Quelle conclusion en tirer

Il est évident que les alliances en matière d’anti-terrorisme imposent des limites au renseignement économique. Il est difficile pour beaucoup de pays de gérer cette dichotomie entre les alliés dans la guerre contre le terrorisme, alliés qui deviennent des ennemis dans la guerre commerciale.

Nous sommes donc entrés depuis quelques années dans une zone de fortes turbulences économiques. Chaque nouveau contrat ou client étranger peut être source de risques financiers énormes. Risques liés à l’extraterritorialité des lois, à la corruption, à la cybersécurité, au terrorisme, ou à la manipulation de certaines ONG. Les grands groupes y font face en créant des « War Rooms » leur permettant d’anticiper. Les PMI et ETI, elles, prennent souvent trop de risques à cause de leur manque de connaissances et de sensibilité aux menaces. Il est vital de conquérir de nouveaux marchés, mais qui dit conquérir dit guerre. Des consultants pourront vous aider dans ce domaine.

 

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