Le secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Baptiste Lemoyne, avait exprimé sa volonté de voir le nombre de volontariat international en entreprise (VIE) augmenter de 10 000 à 15 000 dans une proche échéance. Cet objectif vous semble-t-il réaliste ?
Michel Bauza : Dans un premier temps, notre objectif vise à passer d’un peu plus de 10 000 à 12 000 V.I.E en poste à l’horizon 2022, ce qui correspondrait déjà à une importante progression de 20% sur cette échéance. Par la suite nous pourrons ambitionner d’aller au-delà, comme l’a d’ailleurs rappelé récemment M. Lecourtier (directeur général de Business France, la structure en charge de l’internationalisation de l’économie française qui englobe également le dispositif VIE, Ndlr). Ce développement du nombre de missions est nécessaire pour soutenir le développement de l’économie française à l’international. Nous y travaillons mais il s’agit d’un processus de gestion RH qui s’inscrit forcément dans le temps et qui supposera également un renforcement des moyens pour pouvoir gérer l’ensemble de ces missions supplémentaires.
Quel est le niveau de diplôme requis pour postuler et quels sont les profils recherchés ?
M.B. : Aucun niveau de diplôme n’est requis. Pour autant, il convient de rappeler que ce sont les entreprises qui choisissent les jeunes, et dans les faits ce sont aujourd’hui majoritairement des titulaires de master 2 qui sont choisis par ces dernières, avec une moyenne d’âge qui oscille actuellement entre 25 et 26 ans. En effet, un certain niveau de maturité est attendu par les entreprises, en rapport avec les missions qu’elles proposent à ces jeunes. Toutes les spécialités professionnelles sont possibles dans le cadre d’un V.I.E mais ce sont surtout les missions autour des fonctions financières, de l’audit, de l’ingénierie et du développement commercial qui dominent.
Au terme de leur mission, les jeunes sont-ils souvent embauchés sur le lieu où ils ont effectué leur volontariat ?
M.B. : Quelque 70% des jeunes volontaires reçoivent une proposition d’embauche de l’entreprise qui les a accueillis à la fin de leur mission. Bien souvent, une entreprise qui accueille un VIE tend en effet à le considérer comme un futur collaborateur. Mais comprenez que ce taux correspond aux propositions d’embauche des entreprises, or tous les jeunes n’y répondent pas forcément favorablement, pour différentes raisons, notamment des poursuites d’études. Toutefois un autre chiffre est très signifiant, ce sont les 92% des jeunes qui sont en activité très peu de temps après avoir réalisé un VIE, ce qui signifie que le taux d’employabilité augmente significativement pour ceux qui sont passés par ce dispositif, à niveau d’études égal. Ces acquis, ce savoir-être à l’international sont objectivement recherchés sur le marché de l’emploi.
Au-delà de l’Amérique du Nord et de l’Europe, y a-t-il d’autres destinations à développer, notamment sur le continent africain ?
M.B. : Il est indéniable que l’Afrique va jouer un rôle crucial sur le plan économique dans les années à venir et nous aimerions en effet renforcer nos propositions de VIE sur ce continent où les volontaires sont déjà présents notamment via des hubs régionaux, comme en Tunisie, au Maroc, en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Cameroun, au Gabon, au Kenya à Madagascar ou encore en Afrique du Sud. Néanmoins, il est clair que les questions sécuritaires sont parfois sensibles dans certains de ces pays et nous veillons particulièrement à cet aspect, notamment sur des destinations qui peuvent être considérées comme comportant des risques.
Quelle est la part des PME et des grandes entreprises dans ce dispositif ?
M.B. : Les PME et des ETI sont majoritaires en termes d’entreprises utilisatrices du V.I.E. C’est un signal de la réussite de ce dispositif. Nous mettons en effet à disposition de ces structures des solutions simples et intégrées pour favoriser la mobilité internationale. Mais historiquement, les grandes entreprises ont aussi toujours eu recours à ce type de programme, comme autrefois avec les coopérants du Service national ; or elles ont aujourd’hui la possibilité d’accueillir des jeunes femmes et une palette de compétences bien plus large à travers le dispositif du VIE.
Par qui le volontaire est-il rémunéré et quel est le montant de cette rémunération ?
M.B. : Le jeune reçoit une indemnité qui est fixée selon des barèmes qui prennent en compte le coût de la vie dans les différents pays, l’éloignement, etc. Le montant de ces indemnités est d’ailleurs consultable sur notre site internet. Cette indemnité est versée par Business France, avec qui le jeune sélectionné signe une lettre d’engagement de volontariat. Dès lors, nous gérons tous les aspects administratifs et financiers relatifs à la mission. Par ailleurs, le jeune bénéficie d’une couverture sociale équivalente à celle de tout assuré social en France, quelle que soit sa destination.
Comment Business France intervient-il dans la gestion du dispositif ?
M.B. : Rappelons que nous intervenons pour le compte de l’État français. Dans un premier temps, nous cherchons à sensibiliser le plus grand nombre de candidats au volontariat, notamment par des partenariats étroits avec les écoles, les universités, les centres de formation, afin de communiquer sur cette opportunité. Les jeunes intéressés peuvent s’inscrire sur la plateforme civiweb.com qui regroupe l’ensemble des postulants au départ ainsi que les entreprises qui offrent des missions. Pour nous rapprocher de ces dernières, nous assurons un véritable travail de terrain avec l’ensemble de nos partenaires – dont le réseau des chambres de commerce et les conseillers du commerce extérieur qui nous aident beaucoup – pour informer les entreprises sur la solution que représente le VIE par rapport à leurs projets de développement et de recrutement de jeunes talents, puis pour les accompagner en matérialisant cette offre de mission dans leur business plan.
Notre rôle consiste ensuite à assurer cette mise en relation entre les entreprises et les volontaires éligibles, puis à la formaliser par un contrat, une lettre d’engagement, une préparation à cette mission avec une journée d’intégration à Paris afin de sensibiliser les jeunes à leur future mission et les informer sur de nombreux aspects pratiques et déontologiques. À leur arrivée, ils sont reçus dans leur pays d’accueil par un correspondant VIE, représentant de Business France ou de l’Ambassade de France, qui va leur donner de précieux compléments d’information et qui restera leur correspondant de proximité durant le temps de leur mission. En revanche, sur le plan professionnel, c’est bien sûr l’entreprise qui va indiquer au volontaire ses attentes et piloter opérationnellement la mission.
Quelle est aujourd’hui la durée moyenne des missions ?
M.B. : Elles peuvent s’étendre jusqu’à 24 mois mais la majorité des missions se déroule actuellement sur une période de 18 mois.
Le volontariat international en entreprise (V.I.E) se décline aussi dans les administrations françaises (VIA) à l’étranger…
M.B. : Effectivement un peu plus de 1 000 V.I.A effectuent leur mission dans ce cadre, notamment dans les ambassades ou dans différents services de l’État français à l’étranger, comme en propose régulièrement le site civiweb.com.
Pour en savoir plus :
• Le site internet du Volontariat international : https://www.civiweb.com/
• Le blog du VIE : https://vie.businessfrance.fr/
• Le site internet de Business France : https://www.businessfrance.fr
> Le Volontariat international à la loupe
Pour être éligible, le candidat doit être âgé de 18 à 28 ans, être issu de l’espace économique européen ou de Monaco, jouir de ses droits civiques et présenter un casier judiciaire vierge. Le dispositif VIE est adapté aux entreprises de toutes tailles, mais il est aujourd’hui utilisé principalement par les PME-ETI, à hauteur de 65%.
En août 2018, 10 133 volontaires étaient en poste au sein de 1 958 entreprises. Les États-Unis représentent la première destination d’affectation avec 1 353 jeunes en poste, devant la Belgique (1 328) et l’Allemagne (975). Le secteur bancaire est le premier destinataire des missions de volontariat (1 267), devant l’industrie automobile (829), l’industrie pharmaceutique (766), les services informatiques (482) et le conseil et l’ingénierie en systèmes informatiques (438). Enfin, l’Ile-de-France est de loin la Région qui concentre le plus d’entreprises utilisatrices de ce dispositif (49%), devant la Région Auvergne-Rhône-Alpes (12%).
Sources : Business France, août 2018.
> Une cure de jouvence pour le programme
Le dispositif du Volontariat international s’est doté récemment d’une nouvelle identité visuelle (voir les logos ci-contre) pour renouveler son image. Au-delà, ses dix-huit années d’existence sont aussi l’occasion de collecter des retours d’expérience et d’en faire partager les entreprises. À cet effet, Business France va publier d’ici la fin de l’année une charte des bonnes pratiques et des valeurs du VIE pour les entreprises. De quoi poser les jalons d’un avenir pérenne pour le Volontariat international.