La famille de l’entrepreneur français, Jean-Emmanuel Koutouzis, a obtenu le 23 janvier une réponse en demi-teinte de son assurance liée à sa carte de crédit, ING Assistance. Après plusieurs semaines de refus, celle-ci a finalement accepté de reconsidérer le dossier et de prendre en charge les frais de rapatriement de Jean-Emmanuel Koutouzis, de Miami jusqu’à Bruxelles, ainsi qu’une partie de ses frais d’hospitalisation. Seul bémol, l’assureur a fait savoir à sa famille qu’il se réservait le droit de procéder au recouvrement des sommes – s’élevant jusqu’à 175 000 euros – , considérant toujours que Jean-Emmanuel Koutouzis avait commis une faute grave. «Ce qui me pose problème, c’est que ça peut arriver à tout le monde» déclare le sénateur des Français de l’étranger Olivier Cadic, qui s’intéresse de près depuis plusieurs semaines à cette affaire et a lui-même tenté de convaincre ING Assistance de revoir le dossier. « Pour moi, la faute grave doit être qualifiée ». Il ajoute : « dans une position affaiblie, on menace de poursuites, c’est quand même dur comme attitude ». Suite aux réserves émises par l’assurance, Anne Breton, l’épouse de Jean-Emmanuel Koutouzis, s’était immédiatement opposé à ces conditions, les qualifiant d’«épée de Damoclès », tout en décidant de rapatrier son époux en utilisant notamment l’apport de leur future maison ainsi qu’une cagnotte lancée sur Facebook.
> Le dossier de Jean-Emmanuel Koutouzis en question
La « faute grave » pointée du doigt par ING Assistance s’est déroulée à Miami, aux Etats-Unis, le 7 décembre. Cette nuit là, Jean-Emmanuel Koutouzis, propriétaire d’une brasserie à Bruxelles et ex-militaire français, s’est fait heurter par un taxi en traversant la rue, sur les passages piétons, alors que le feu de circulation était au vert. Selon ING, le fait de traverser ainsi constitue une faute grave dans l’Etat de Floride et en Belgique, et justifie ainsi le non-remboursement, ou, dans sa dernière réponse, un éventuel recouvrement de ces frais. Or la facture est élevée : après avoir été placé pendant plusieurs semaines dans un coma artificiel, victime d’un traumatisme crânien et de multiples fractures, Jean-Emmanuel Koutouzis est resté plus d’un mois dans un hôpital américain, pour ensuite être rapatrié en avion sanitaire.
> Les interventions d’Olivier Cadic auprès d’ING
« J’ai été contacté un soir par un jeune cadre d’entreprise basé en Belgique », raconte Olivier Cadic, « qui m’a informé de la situation de Monsieur Koutouzis. Ils avaient mis en place une cagnotte sur Facebook. Il me demandait mon soutien pour aider son épouse à convaincre la compagnie d’assurance de prendre en charge les frais d’hospitalisation, les frais de rapatriement » . Après avoir contacté la Direction des Français de l’étranger (DFAE), Oliver Cadic s’était ensuite entretenu avec l’assureur : « Je leur ai fait valoir que je comprenais bien leur point de vue mais que, pour moi, le concept de faute grave était assez difficile à comprendre parce que c’est quand même assez vague. Pour moi, la faute grave, c’est une mise en danger délibérée de soi-même, mais là, je ne le comprend pas, pour ce cas spécifique. Tout ça fait qu’il y a une sorte de flou, de mon point de vue, qui justifie que la dame en question soit légitime à dire qu’elle n’est pas satisfaite».
Un commentaire qui fait échos aux déclarations d’Assuralia, la fédération belge du secteur de l’assurance, concernant les assistances liées aux cartes de crédit : « le droit belge impose que les exclusions soient concrètes pour être opposables » avait déclaré son porte-parole Wauthier Robyns.
> ING Assistance r(entr)ouvre le dossier
Au lendemain de plusieurs articles de presse, des interventions du sénateur ainsi que celles de la DFAE et de Pieyre-Alexandre Anglade, député des Français du Benelux, Olivier Cadic a finalement reçu le 23 janvier au matin un email d’ING lui annonçant qu’il revoyait sa position et allait rembourser la famille de Jean-Emmanuel Koutouzis. Mais, quelques heures plus tard, cette affaire, qu’il espérait close, s’est révélée ne pas être totalement résolue : «J’ai appris ensuite que l’assurance avait envoyé un mail différent à Madame Breton disant qu’il se réservait le droit de réclamer les frais qu’ils avaient engagés. C’est une pression psychologique. Mme Breton n’a pas supporté cette pression, ne voulant pas se confronter à un procès au milieu de tous les tracas de santé de son époux».
Depuis qu’elle a refusé d’accepter les conditions présentées par ING, Anne Breton attend toujours un retour sur son dossier. Interrogé par le Journal des Français à l’étranger, ING a répondu que ce dossier “fait actuellement l’objet d’une analyse approfondie par nos services concernés. Dans un souci d’être au service de notre client, nous avons décidé de l’aider et nous l’en avons informé. Pour des raisons évidentes de respect de la vie privée, nous ne pouvons pas donner davantage de détails sur ce dossier”
> Des implications pour tous les Français à l’étranger
Pour Olivier Cadic, le dossier n’est pas clos : « Vous disposez d’une assistance liée à votre carte de crédit, pour avoir quelque chose qui vous prenne en charge. Si tout de suite on vous dit «non, je ne couvre pas parce qu’il y a une faute», ça pose des doutes sur les fonctionnements des contrats. Moi ce qui m’importe, c’est d’avoir des éclaircissements sur le concept de « faute grave», où est-ce que c’est défini, déterminé ». Selon le sénateur, les Français de l’étranger doivent être vigilants sur leur contrats : « On va devoir étudier les suites à donner à cette affaire et en attendant informer les Français de l’étranger qu’ils demandent clairement à leur assurance quelles clauses peuvent exister, telles que la «faute grave », et qu’ils se fassent préciser ce que cela veut dire.»