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Actualités internationales

Marc Lévy, le tour du monde en ballon

Sur le Vieux-Port, les anciens ne risquent pas de le confondre avec son homonyme écrivain à succès. Ici, le nom de Marc Lévy reste associé à la formidable épopée des Minots, cette équipe de jeunots tout juste sortis de l’adolescence qui a permis à l’Olympique de Marseille d’éviter les affres de la faillite au début des années 1980. Plus tard, l’ancien gardien de but de la maison Ciel et Blanc a ouvert les portes de sa cage pour s’envoler aux quatre coins du monde. Portrait d’un passionné.

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Nous sommes à la fin des années 1970, l’Olympique de Marseille (« l’Ohèèème ») est au plus mal. Reléguée en Deuxième Division, l’équipe a le blues et les finances sont dans le rouge. L’émissaire de la Ligue nationale de football dépêché dans les Bouches-du-Rhône vient alors sonner le glas des derniers espoirs phocéens : la quasi-totalité de l’effectif professionnel est invitée à pointer au chômage. Reste que le club doit absolument honorer les six dernières rencontres de la saison, au risque de perdre son statut professionnel. Seul recours, aligner les jeunes stagiaires marseillais pour éviter la liquidation judiciaire. Des minots qui viennent certes, en 1979, de remporter la fameuse Gambardella (la Coupe de France des juniors) mais qui risquent d’être bien tendres chez les pros… Pourtant les gamins vont démontrer qu’ils ont le cuir dur, ne concédant aucune défaite durant ces six rencontres et se payant même le luxe de battre le leader Montpellier lors de l’ultime journée, dans un Stade Vélodrome comble. La légende est née. Jean Carrieu prend le relais à la présidence d’un club enfin sauvé, réunit des fonds justifiés par les promesses de cette jeunesse et, à l’issue de la saison 1983-1984, l’OM retrouve enfin son rang en Première Division. S’ensuivront bientôt les années Tapie avec leur cohorte de gloire et de désillusions…

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> De la cour de récré à la cour des grands

L’histoire de Marc Lévy est celle d’un gamin de Marseille arrivé ici quelques mois après sa naissance à Alger en 1961. C’est boulevard National, puis sur la Canebière, et ensuite place de la Bourse qu’il s’écorche les genoux avec ses « collègues ». Nouveau déménagement à Sainte-Marguerite où il signe sa première licence dans ce club de quartier, à l’âge de neuf ans. Il sera gardien de but, comme l’était son père. Très vite, les techniciens de l’OM le repèrent et l’invitent à rejoindre la maison Bleue au sein de laquelle il grandit avec le succès que l’on sait. Las, à la mi-temps des années 80, les envies de grandeur de Tapie conduisent l’homme d’affaires à recruter à tout-va, dont l’international camerounais Joseph-Antoine Bell pour garder les cages de l’équipe. Marc Lévy décide d’aller voir ailleurs, notamment à Pau. Puis un dos récalcitrant et l’envie de transmettre l’incitent à devenir entraîneur.

On n’oublie jamais ses premières amours, mais ce sont parfois elles qui se rappellent à notre souvenir. Dans le cas présent, c’est un coup de fil de Gérard Gili, alors entraineur de l’OM, qui lui propose un retour au bercail au milieu des années 90 pour s’occuper des gardiens phocéens. La collaboration va poser les jalons d’un parcours commun. En 2006, Gili est nommé par la Fédération ivoirienne pour s’occuper de la sélection nationale, il sollicite Marc en qualité de coach adjoint…

> Beveren, banlieue d’Abidjan

La Coupe d’Afrique des nations (CAN) 2008, organisée au Ghana, se profile mais la qualification pour cette phase finale passe d’abord par des oppositions face à la Zambie, au Mali et au Sénégal… Des déplacements épiques, des rencontres âpres en terrain hostile, mais aussi, au sein de la sélection ivoirienne, « des relations humaines très fortes et une union sacrée autour du drapeau ivoirien… J’en garde un souvenir extraordinaire », explique Marc, qui multiplie les allers-retours entre la France, la Côte d’Ivoire et… la Belgique ! Plus précisément à Beveren, commune flamande proche d’Anvers, mais aussi club-laboratoire des jeunes pousses du football ivoirien, né d’un rapprochement avec l’Académie d’Abidjan dirigée par un autre éducateur français légendaire, Jean-Marc Guillou. Le Marseillais vient repérer ces talents déracinés, appelés à épauler en sélection nationale Didier Drogba, la superstar du foot africain. L’équipe ivoirienne ira jusqu’en demi-finale de cette CAN 2008 au Ghana. Autre moment fort quelques mois plus tard avec la sélection des Espoirs ivoiriens que Gili et Lévy sont parvenus à qualifier pour les Jeux olympiques de Pékin. Au-delà de l’élimination en quarts de finale, l’histoire retiendra que la route des Ivoiriens aura croisé celle de l’Argentine d’un certain Lionel Messi… De cette expérience africaine, Marc Lévy retire une conviction, celle de « prendre le temps de se faire accepter, d’apprendre la culture des autres pour appréhender des valeurs qui ne sont pas forcément les nôtres ».

> Or noir et Petit Livre rouge

« La vie de sportif professionnel est la plus belle qui soit, à condition d’accepter la précarité qui l’accompagne », dit Marc Lévy, contraint d’assumer une nouvelle remise en question au terme de l’aventure ivoirienne après les JO de Pékin. Mais rapidement, toujours avec Gili, une opportunité se présente. Ce sera le Qatar, au sein du club de Umm Salal, à 20 km de Doha. Nouvelle aventure humaine et nouveau challenge sportif avec la participation à la Champions League d’Asie, la découverte d’autres types de jeu et la possibilité de satisfaire cette inextinguible soif de rencontres. Aux antipodes des entraîneurs d’autrefois avec le sifflet autoritaire autour du coup, les coachs sont aujourd’hui rompus à l’individualisation des approches, d’autant plus lorsqu’ils viennent de l’étranger. Alors quid de la psychologie du footballeur qatari selon coach Lévy ? : « Les joueurs étaient globalement très à l’écoute, surtout lorsqu’ils sentaient que c’était réciproque, mais il est indispensable de respecter ici quelques règles d’or : ne pas s’énerver, ne pas élever la voix au risque d’être complètement discrédité. »

Deux ans après l’aventure qatarie, en 2010, c’est le retour en Provence. Mais la passion demeure, surtout lorsqu’une gloire du football français, Jean Tigana, l’appelle pour le seconder dans un nouveau challenge… en Chine, au Shenhua FC, basé à Shanghai. La vie dans la métropole chinoise et ses 24 millions d’habitants est rythmée par la voiture du club qui vient le chercher tous les matins à domicile car il est illusoire d’espérer conduire à Shanghai, et un sentiment mitigé exprimé à mots couverts : « Les échanges auront été limités durant cette expérience car les Chinois sont habitués à vivre entre eux. D’ailleurs les joueurs n’avaient pas de possibilité de sortir du camp d’entraînement avant l’âge de 23 ans. Quant au championnat lui-même, il semble qu’il ait parfois quelques zones d’ombre… »

> Humilité, le mot-clé

De cette existence faite d’aventures mais aussi d’incertitudes, la vie de famille ne risque-t-elle pas de pâtir ? : « J’ai toujours privilégié la stabilité de ma famille, les miens me rejoignant dès que possible », explique ce père de deux enfants et grand-père de cinq petits-enfants qui tâte aussi brillamment du saxophone. Mais au fait, l’expérience chinoise a-t-elle signé la fin des aventures extraterritoriales du Minot de Marseille ? Non. En 2014, un autre entraîneur français, Erick Mombaerts, lui a proposé de travailler avec lui au Japon, au sein du club de Yokohama F Marinos. Il eut été dommage de rester sur une mauvaise image de l’Asie, et il rejoint la ville portuaire japonaise avec son épouse. Dans le club de l’entreprise Nissan (au Japon les clubs sont souvent liés à une entreprise), Marc va découvrir « des joueurs ultra-disciplinés, respectueux des codes établis, même si c’est parfois au détriment de la prise d’initiative. Parallèlement, la vie quotidienne est tellement agréable, avec un sentiment de sécurité évident et le respect de son prochain omniprésent. La pudeur et la retenue des sentiments sont caractéristiques des Japonais, raison pour laquelle les larmes qu’ils ont versées lors de notre départ m’ont beaucoup touché… »

Pour finir, quel conseil donnerait-il à un jeune désireux de tenter sa chance à l’étranger, y compris dans des championnats de seconde zone ? « Il faut y aller en prenant un minimum de garanties, notamment au plan contractuel, mais l’aventure vaut le coup d’être vécue car la vie n’est faite que d’expériences et du fruit de ce que nous créons. Mais sans jamais se départir du sens de l’humilité. » Le cœur reste bleu, mais la parole est d’or…

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