Etudier et travailler
Abidjan : la Mission laïque française ouvre un centre de développement professionnel
Renforcer l’enseignement français dans le monde passe nécessairement par une formation adaptée des enseignants de plus en plus souvent recrutés localement. Pour répondre à cette demande croissante, la Mission laïque française (MLF) ouvrira en septembre un Centre de développement professionnel à Abidjan. Pour en parler, Jean-Christophe Deberre, son directeur et Julie Higounet, chargée de mission.
Qu’est-ce qui a motivé votre décision d’ouvrir ce centre de développement professionnel ?
Jean-Christophe Deberre : Depuis plusieurs années la mission laïque s’est beaucoup interrogée sur la question de la formation des enseignants. D’abord parce que ses déclinaisons locales obligent à considérer le profil différent des enseignants selon les pays, chacun avec leurs spécificités. Ensuite parce que le nombre de recrutement local est croissant. Ces personnels sont issus d’universités nationales, qui connaissent plus ou moins le programme français, qui souvent ont acquis une pratique pédagogique qui, si elle est efficace, est différente de la nôtre, car la pédagogie, c’est d’abord une culture. Cette problématique nous a obligé à penser la montée en compétence de ces personnels à partir de leurs propres questionnements. Pour nous, il est essentiel de les rendre acteur de leur propre formation à partir de ce qu’ils sont et de ce qu’ils ont envie d’être. Il faut les aider à construire leur propre parcours.
La Mission laïque fait aussi de la coopération éducative. Et nous nous sommes aperçus qu’en Afrique de l’Ouest et au Maroc (où nous allons également va ouvrir un centre à Rabat), beaucoup d’établissements s’inspirent du programme français sans forcément souhaiter être homologués. Néanmoins, ils veulent que leurs personnels soient formés à partir des savoir-faire français, notamment pour la rigueur de leurs fondamentaux. Historiquement, la MLF, a toujours voulu développer cette coopération avec les systèmes étrangers, notamment francophones. Comme la ressource enseignante se fait rare et que les parents sont de plus en plus attentifs à la qualité de la formation des enseignants, nos instances ont souhaité que nous soyons partie prenante de cet énorme effort réalisé pour la formation. D’ailleurs, pour ce projet nous devrions être accompagné financièrement par Proparco, filiale de l’agence française de développement, principal opérateur de la coopération française.
Quelles seront vos offres de formation ?
J.-C. D. : Nous souhaitons déjà être attractifs et aller au-delà de la Côte d’Ivoire en faisant venir à Abidjan des stagiaires du Togo, du Bénin et des pays du Sahel. Au Maroc, notre réseau touche plus de 1 000 enseignants. Nous aurons plusieurs offres de formation, articulant des formations initiales et continues, incluant l’ingénierie pédagogique et l’accompagnement éducatif local, en présence ou à distance, sur des périodes variables. Nous construisons ainsi des parcours certifiant et diplômants, et puisque ce sont des dispositifs de coopération, ils seront cofinancés avec l’Agence française de développement(AFD). L’accompagnement de Proparco permettra de prendre en charge financièrement la formation des enseignants pour des établissements ayant des ressources limitées.
Julie Higounet : Nous aurons des contenus complémentaires les uns des autres. Un pôle sera dédié aux notions de plurilinguisme. Des contenus didactiques contextualisés et des éléments propres à l’enseignement en milieu plurilingue seront des axes à privilégier. Il est aussi très important de travailler en lien avec la recherche en neurosciences, sur les sciences cognitives. Nos centres pourront s’adresser aux sortants d’université, afin de les aider à prendre en charge des classes, comme à des enseignants déjà sur le terrain. Nous aurons une branche dédiée à l’ingénierie pédagogique, car il faudra aider les professeurs à devenir des accompagnateurs, des référents de cycle. Pour leur permettre de développer au mieux leurs compétences, nous avons prévu des formations sur des temps longs, pour que les professeurs sur le terrain mettent au fur et à mesure en pratique leurs nouvelles acquisitions. Cela impliquera un changement réel de pratique pour les personnels, car pour intégrer de nouvelles compétences métier, il faut du temps.
A qui s’adresse exactement ce centre de formation ?
J.-C. D. : Nous pensons commencer avec quelque 500 stagiaires sur l’année, près d’un millier au bout de cinq ans. Ces centres sont ouverts aux établissements de la MLF mais également à des établissements non homologués. Nous nous adressons à nos personnels qui pourront se former, mais sans injonction de notre part, qui pourront venir avant ou après leur prise de fonction, ainsi qu’à des étudiants puisque nous avons des formations montées en partenariat avec des universités, par exemple avec celle de Laval au Canada pour les formations des personnels d’encadrement. Nous insisterons, et cela est nouveau, sur le plurilinguisme, la possibilité de former les personnels d’encadrement qui ne sont pas les « cibles » traditionnelles de l’Education nationale puisqu’il s’agit souvent d’établissements privés.
La crise sanitaire actuelle a-t-elle compromis l’ouverture de votre centre ?
J.-C. D. : Non, au contraire, le besoin de formation n’en apparaît que plus fort. Car ces établissements ont besoin de professeurs, que les parents respectent, estiment. Pendant la crise sanitaire, les parents ont exprimé de façon plus forte leur satisfaction ou leur insatisfaction. Le lien entre l’exigence parentale et la qualité offerte s’est renforcé. En outre, il faut réfléchir au fait qu’un certain nombre de professeurs français ne voudront plus partir à l’étranger. La crise a provoqué un grand stress parmi des personnels expatriés pour lesquels cela a été difficile d’être coupés de leur famille, de vivre le confinement dans un pays étranger. Cela renforce notre conviction : nous devrons nous appuyer encore davantage sur les personnels nationaux.
Nous avons aussi observé que notre Forum pédagogique a été très sollicité durant cette période. La crise actuelle a renforcé les demandes en formation de nos personnels. Ces derniers se remettent en question, ils capitalisent ce qu’ils vivent à travers cette crise par une relation nouvelle avec leurs élèves. Cela a eu un effet booster très fort sur la nécessité de changer les pratiques.
Votre centre de formation répond-il à la volonté d’Emmanuel Macron de renforcer l’enseignement français à l’étranger ?
J.-C. D. : En partie oui, car les écoles dont le programme est national mais qui envoient leurs personnels se former chez nous pourront à terme trouver un intérêt à demander un dossier d’homologation qui, il faut le dire, impose des contraintes que tous les établissements ne peuvent pas toujours assumer. Cela participe à l’implantation et à l’ancrage de la langue française. Cela permettra aussi de recruter des personnels nationaux mieux formés, ce projet économique est plus viable pour des petites structures. Nous nous inscrivons dans la grande tradition de coopération française avec ces grandes régions du monde.
Pour en savoir plus : cdp.mlfmonde.org
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