Anticiper. Tel pourrait être le mot d’ordre qui a motivé cette réunion de préparation préalable à la stratégie de vaccination pour les Français vivant à l’étranger et dont les contenus ont été partagés par le sénateur Robert Del Picchia (LR). Jusqu’alors, le gouvernement a indiqué les trois temps forts de l’accès au(x) vaccin(s), avec une phase 1 destinée aux personnels de santé et résidents des EHPAD qui devrait s’étendre de janvier à février, avant que les personnes à risque, puis que l’ensemble de la population y ait accès.
Pour autant de nombreuses questions demeurent, dont celle qui concerne l’ensemble de la communauté française sur le choix du – ou des – vaccins qui seront proposés.
Mais l’accès des ressortissants français de l’étranger à la vaccination renvoie à des problématiques spécifiques, notamment au plan logistique avec les contraintes de conservation particulières que semblent nécessiter ces vaccins.
L’évaluation des quantités de doses vaccinales a aussi aussi l’objet d’une réflexion partagée par les participants à cette réunion, en référence notamment au faible niveau de vaccination de la grippe H1N1 de 2009 où 550.000 doses de vaccins avaient été envoyées pour seulement 62.800 actes de vaccination, avec pour conséquence la destruction de grandes quantités de doses vaccinales.
Des questions en suspens
Les parlementaires représentant les Français de l’étranger ont profité de cette réunion pour faire part de leurs questionnements, voire de leurs préconisations. Ainsi, Amelia Lakrafi (députée LREM) propose pour cette campagne de vaccination de s’appuyer sur « les centres médico-sociaux, les instituts Pasteur ou, s’il n’y en a pas, sur les médecins des ambassades », questionnant également sur la possibilité « d’envoyer des doses gratuites, et le recours à des médecins qui pourraient vacciner les plus vulnérables dans la même logique qu’ici ? »
Pour sa part, le sénateur Ronan Le Gleut (LR) invoque la nécessité « d’un audit, certains États ayant une stratégie de vaccination qui intègre les Français de l’étranger, et d’autres non », et soulignant par ailleurs l’importance « d’associer la CFE à cette réflexion ». Ce recours à la CFE fait aussi écho chez le sénateur Christophe Frassa (LR) qui évoque le fait que « en 2009, le gouvernement avait associé la CFE pour avoir accès aux fichiers et mener la campagne [de vaccination contre la grippe H1N1, ndlr] ». En réponse, le secrétaire d’État Jean-Baptiste Lemoyne précise que « l’audit a débuté pour pointer les stratégies locales », avec effectivement « l’idée d’associer la CFE ».
De son côté, la sénatrice Jacky Deromedi (LR) plaide pour les Français installés dans des pays où l’accès à l’aide est difficile, « tous n’étant pas adhérents à la CFE, certains n’ayant pas les moyens de payer cette cotisation ».
Plus largement, la députée Anne Genetet (LREM) interroge sur la mise à disposition des vaccins pour les Français de l’étranger, expliquant son raisonnement par le fait que « certains Français de l’étranger n’ont ni les moyens, ou sont dans des pays où la vaccination est interdite aux étrangers, comme au Koweit par exemple ». La députée ajoute : « Quid des agents titulaires et droit local ? ». Elle considère en outre que « le choix des vaccins pose des questions géopolitiques », avec le risque d’envoyer des vaccins « dans des pays où ils n seront pas reconnus ». En substance, Anne Genetet souhaite que le vaccin soit calqué sur l’état sanitaire local, plutôt que strictement sur ce qui se fait en France.
Dans une logique proche, Marc Villard, président de l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE), pense qu’il va être « compliqué de mettre en place une stratégie mondiale et duplicable ».
Concertation européenne
En guise de résumé, Axel Cruau, responsable de la « Task Force Covid » au sein du ministère des Affaires étrangères explique la nécessité de « savoir où l’on se situe en France et dans le monde », avec notamment des questionnaires envoyés dans les postes diplomatiques, indiquant par ailleurs que « la concertation européenne a débuté, en particulier avec l’Allemagne et le Royaume-Uni » qui ont des problématiques assez proches. Axel Cruau a également confirmé que l’association avec la CFE était à l’étude, avec un retour d’expérience sur 2009.
D’autre part, Alain Fisher, le professeur d’immunologie nommé par le gouvernement pour piloter sa stratégie vaccinale, a également été sollicité par le ministère des Affaires étrangères sur cette question de la vaccination des Français vivant à l’étranger. Elle devrait être abordée lors d’un prochain conseil de défense.