Face au grand flou des retraites pour les travailleurs français de l’étranger, la Cour des comptes fait part de ses inquiétudes à Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé. Dans un référé du 11 mars dernier, la Cour a procédé à une enquête sur la coordination internationale en matière de retraites obligatoires. Les travailleurs ayant eu des carrières dans plusieurs pays se retrouvent pénalisés et ne bénéficient pas systématiquement d’une pension à taux plein.
Des accords bilatéraux avec 70 pays
Le traitement est censé être équitable entre les personnes ayant travaillé à l’étranger et celles ayant effectué l’ensemble de leur carrière en France. Normalement, une coordination internationale est mise en place afin d’harmoniser les règles selon les pays. La France a signé des accords bilatéraux avec les pays de l’Union européenne, de l’espace économique européen ou encore la Suisse. Si l’on ajoute à cela les accords hors de l’Europe, il y a près de 70 États qui sont concernés par ces accords sur la retraite obligatoire.
Une opacité des chiffres
Pourtant, cette coordination internationale semble manquer d’efficacité. La Cour des comptes dénonce le manque de transparence de cette coopération entre Etats. En effet, il est extrêmement difficile de vérifier si les salariés à la carrière internationale bénéficient de l’ensemble de leurs droits en matière de pension. D’après le Centre des Liaisons Européennes et Internationales de Sécurité Sociale (CLEISS), le non-recours à ces droits est très fréquent chez les expatriés.
Des disparités de traitement
Les différents systèmes de retraite et le manque de coordination ont pour conséquence un traitement inégalitaire entre les carrières internationales et françaises. Cela touche particulièrement trois types de profils.
- Les travailleurs indépendants, qui sont trop souvent évincés des accords bilatéraux. La Cour des comptes révèle qu’ils ne sont concernés que par 13 accords bilatéraux sur les 38 existants.
- Les expatriés qui ont fait carrière dans plusieurs pays (dont au moins un n’a pas signé d’accord) ne peuvent pas totaliser l’ensemble de leurs trimestres de cotisation.
- Concernant le cumul emploi-retraite, les expatriés peuvent additionner leurs droits si ils reprennent une activité à l’étranger. Ce n’est pas le cas si ils poursuivent leur emploi en France.
Les préconisations de la Cour
La Cour des comptes recommande tout d’abord de rassembler des données chiffrées. L’objectif est de vérifier que les assurés ayant effectué une partie de leur carrière à l’étranger bénéficient de leurs droits à une retraite complémentaire. Les Sages proposent ensuite de renforcer les pouvoirs du CLEISS afin de limiter le nombre d’acteurs et d’intermédiaires. Ils souhaitent également mettre en place « pour les assurés relevant de la coordination internationale résidant en France, une instruction des dossiers de retraites par des services spécialisés par pays ». Enfin, la Cour épingle la France sur des risques de contentieux avec les règles européenne. Notamment la mise en œuvre de la LURA, le régime spécial de la Mutuelle sociale agricole (MSA) et la conversion « des périodes validées à l’étranger arrondie à l’unité supérieure la plus proche ».