Ils constituent près du quart des effectifs des ingénieurs locaux et les entreprises espèrent bien voir leur nombre augmenter… Ces oiseaux rares, ce sont les ingénieurs qui ont immigré au Québec pour apporter leur savoir-faire dans cette grande diversité d’activités où leurs compétences sont si précieuses : construction, technologies de l’information, aérospatiale, environnement médical, transports, industrie lourde, énergie, mécanique, biotechnologies… La part des travailleurs immigrés dans les métiers de l’ingénierie au Québec (24% des effectifs) est d’autant plus importante lorsqu’on la met en rapport avec leur présence dans l’ensemble de la population québécoise (12%). La France occupe la première place des pays d’origine de ces diplômés à l’étranger détenant un permis de pratique de l’Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ), près d’entre aux y ont été formés. À noter, plus d’un millier d’autres ingénieurs, le plus souvent francophones, ont été diplômés en Afrique du Nord (Algérie, Tunisie, Maroc).
Une présence féminine trop faible, mais en progression
Comme pour illustrer l’importance croissante de ces fonctions à haute valeur ajoutée dans l’activité économique de ce monde, la place des ingénieurs n’a cessé de croître au Québec depuis ces dix dernières années. D’autant que ces professionnels peuvent exercer des fonctions extrêmement variées : recherche et développement, conception, fabrication, exploitation, commerce, conseil, enseignement, etc. Selon l’étude «Profil de l’ingénieur d’aujourd’hui et de demain» (avril 2021) conduite par l’Ordre des ingénieurs du Québec, la profession représente aujourd’hui 1,6% du total des emplois dans la province (contre 2,3% en France et 3,1% au Japon). Cela semble assez peu mais les effectifs ont tout de même enregistré une croissance moyenne annuelle de 3% depuis 2006 et cette progression se poursuivra durant de la prochaine décennie.
Bonne nouvelle, la part des femmes a également augmenté dans cette profession. Elles n’étaient que 4% en 1990, elle représentent aujourd’hui 15% des effectifs de l’ingénierie québécoise (contre 20% en France). L’augmentation du nombre de femmes dans ces métiers est d’ailleurs un enjeu important pour l’avenir du secteur. À cet effet, le Québec a souscrit à l’initiative «30 en 30», impulsée par l’Association of Professional Engineers and Geoscientists of Alberta (Apega), qui ambitionne d’atteindre le taux de 30% d’ingénieures d’ici 2030.
Des besoins plus prononcés dans certains secteurs
Aujourd’hui, quelque 75.000 professionnels exercent dans le domaine de l’ingénierie au Québec. Selon les projections de l’OIQ d’ici 2030, le ratio entre les postes à pourvoir et les candidatures potentielles devrait être assez équilibré, avec une pénurie de postes évaluée à 1,6%, un score plutôt minime comparativement à d’autres secteurs. Toutefois, l’Ordre a affiné ces futurs besoins des entreprises en fonction des domaines d’expertise. Ainsi, à l’horizon 2030, ce sont avant tout l’informatique, le chimique, l’électrique et l’électronique qui connaîtront les plus gros déficits de main-d’œuvre. Comme l’explique l’OIQ, les besoins en informatique seront tirés par «la tendance à la numérisation dans l’ensemble des secteurs économiques», tandis que ceux en génie électrique et électronique seront boostés par «le virage numérique, la transition énergétique et l’électrification des transports». En ce qui concerne le génie chimique, l’OIQ pointe une accélération des besoins en main-d’œuvre compte tenu du lancement d’une filière de l’hydrogène et de la croissance du parc de véhicules électriques.
Plus largement, les grandes voies d’avenir pour les métiers de l’ingénierie, selon l’Ordre des ingénieurs du Québec, concernent la transition énergétique et l’électrification des transports (fabrication de composants de véhicules électriques, production et stockage d’électricité verte, hydrogène et carburants…) ainsi que les métiers en lien avec l’aérospatiale, la conception de logiciels et la cybersécurité.
Zoom sur les systèmes électroniques
Ce segment des métiers de l’ingénierie est composée d’entreprises – dont de nombreuses start-up – qui conçoivent des équipements, des instruments et des appareils qui intègrent des systèmes électroniques dans les secteurs industriels ou technologies. C’est le cas par exemple de la robotique, de l’avionique, de l’électrification des transports, du secteur médical, des télécommunications, de l’intelligence artificielle, de l’énergie, de la défense, des villes et industries intelligentes, etc. Quelque huit cents entreprises sont impliquées dans ces activités.
De nombreux métiers concourent à cette dynamique : scientifiques, ingénieurs, programmeurs, techniciens, assembleurs… Ils exercent en électronique, en production, en programmation embarquée et dans les technologies connexes. Cet écosystème des systèmes électroniques recèle des emplois dans l’ensemble du Québec, mais principalement dans les régions de la Capitale nationale (Québec), de la Mauricie (Trois-Rivières et Shawinigan), des cantons de l’Est (Bromont et Sherbrooke), et bien sûr dans le Grand Montréal. Des sociétés d’envergure se distinguent particulièrement et, comme le souligne le pôle d’excellence de l’Industrie des systèmes électroniques du Québec (ISEQ), plusieurs d’entre elles sont leaders dans les marchés où elles opèrent. En voici un aperçu partiel, une visite de leur site internet peut permettre de les solliciter pour candidater directement.
– Assembleurs : M2S Electronique, Gentec, Varitron East West, Digico, IBM, RS Electronics.
– R&D : Explora Technologies, Creaform, Technologie Hypertronic, Tak Design.
– Robotique : Kinova, Mecademic Robotics, Festo Ditactic.
– Avionique : CAE, MDA, ABB Bomen.
– Transport : System Pram, AddEnergie, Eddyfi Technologies.
– Médical : Novo Technologies, Humanware.
– Télécommunications : Exfo, Kontron Canada, MPB Communications, TeraXion.
– Défense : Cysca Technologies.
– Ville et industrie intelligente : Dimonoff, Lumen.
– Distributeurs : Future Electronics, DB Lectro.
Salaires
Repère :1 dollar canadien = env. 0,70 euro
Le salaire annuel moyen dans les métiers de l’ingénierie au Québec s’élève à 104.085 dollars canadiens, soit une rémunération qui correspond au double du salaire moyen constaté dans l’ensemble des professions au Québec (55.706 dollars en 2021, selon Statistique Canada). Toutefois, les salaires sont très variables selon le domaine d’expertise, le type de poste occupé et bien entendu le nombre d’années d’expérience. À titre d’exemple, la rémunération moyenne des ingénieurs et ingénieures qui occupent des postes de gestion et de direction est plus élevée, autour de 136.000 dollars annuel. Ombre au tableau néanmoins, le salaire des femmes est globalement inférieur de 17% à celui des hommes. Une disparité qui n’est malheureusement pas l’apanage du seul domaine de l’ingénierie, ni de celui du Québec en général.
Une profession réglementée
Comme l’explique l’Ordre des ingénieurs du Québec, l’ingénierie faisant partie des 54 professions règlementées au Québec, il est nécessaire de détenir un permis de pratique de cet Ordre pour utiliser le titre d’ingénieur, en vertu de la loi s’y afférant.
Élément important, à l’automne 2020, l’Ordre a élargi l’accès des ingénieurs diplômés français à l’exercice de la profession au Québec en actualisant l’Arrangement sur la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles (ARM), conclu en 2008 avec la Commission des titres d’ingénieur (CTI) de France et avec Ingénieurs et Scientifiques de France (IESF). En conséquence, le nombre de programmes français d’ingénierie agréés par l’Ordre a augmenté, passant de 400 à plus de 560. Ainsi, les titulaires d’un diplôme délivré au sein de ces programmes habilités se voient accorder, sous certaines conditions, une équivalence de diplôme. L’obtention de cette équivalence est un préalable. Par la suite, le parcours des candidats français vers l’obtention du titre d’ingénieur est identique à leur confrères diplômés au Québec.
Quel est ce parcours ? Il est composé d’une partie théorique (avec une formation en ligne suivie de l’examen professionnel) et d’un volet pratique, axé sur six compétences à atteindre en vingt-quatre mois ou plus d’expérience pratique en ingénierie. À noter, certaines de compétences portent précisément sur la pratique du métier d’ingénieur au Canada. Pour rappel, jusqu’alors, les diplômés français devaient réussir un examen professionnel et faire la preuve de trois années d’expérience pertinente en tant qu’ingénieurs, mais sans pouvoir faire reconnaître leurs études. Le parcours a donc été raccourci et, sur l’exercice 2020-2021, 90 diplômés français ont pu bénéficier de cet arrangement.
Où trouver son emploi
Au plan géographique, les emplois se trouvent principalement dans les centres urbains, dans les régions de Montréal et de la Montérégie qui concentrent plus de la moitié des effectifs d’ingénieurs du Québec (respectivement 33% et 21%), bien que l’emploi y soit plutôt en décroissance depuis une dizaine d’années, contrairement aux régions de l’Estrie, du Centre-du-Québec et des Laurentides qui enregistrent une croissance inverse. Les régions de Québec et Laval comptent également des parts importantes de la profession.
Mais comme dans l’analyse sectorielle des besoins en main-d’œuvre, une approche plus fine fait apparaître des spécificités régionales. Dans le détail, comme le précise l’OIQ, le Grand Montréal connaîtra une demande croissante importante dans plusieurs domaines du génie, mais notamment en génie informatique et en génie électrique. En ce qui concerne l’expertise en informatique et en cybersécurité, la demande sera notable en Outaouais, région québécoise frontalière de l’Ontario et de la capitale fédérale, Ottawa. Pour leur part, les régions du Saguenay-Lac-Saint-Jean et de l’Abitibi-Témiscamingue auront des besoins croissants en génie industriel. Enfin, la Gaspésie, péninsule au centre-est du Québec, sera plus particulièrement à la recherche de compétences en génie mécanique.
Comme nous l’avons évoqué précédemment, les métiers de l’ingénierie recèlent un grande diversité de fonctions. Aussi, les emplois se trouvent-ils aussi dans une variété de secteurs comme l’industrie manufacturière, la construction, le transport, les mines, les industries informatiques et culturelles, voire les administrations publiques municipales, provinciales et fédérales, etc.
Justement, les entreprises de services publics québécois sont d’importants pourvoyeurs d’emploi. Le plus important d’entre eux au Québec est d’ailleurs Hydro-Québec, principal producteur d’électricité au Canada et l’un des plus grands producteurs d’hydroélectricité dans le monde. Plus de deux mille membres de l’Ordre des ingénieurs du Québec y exercent dans la production, le transport et la distribution de l’électricité.
Au niveau des ressources pour dénicher son emploi, un grand nombre de sites généralistes proposent des offres, aux côtés de sites plus spécialisés qui affichent régulièrement des centaines, voire plusieurs milliers de postes disponibles. Pour autant, il convient de rappeler qu’une grande partie de ces postes nécessite un permis de pratique de l’Ordre des ingénieurs du Québec.
> Sites spécialisés dans les métiers de l’ingénierie
> Emplois dans l’industrie des systèmes électroniques
Industrie des systèmes électroniques du Québec (ISEQ)
Elexpertise (industrie électrique et électronique)
> Pour en savoir plus
Le top 25 des firmes d’ingénierie au Québec, selon le journal Les Affaires
> Sources
Ordre des ingénieurs du Québec
Profil de l’ingénieur d’aujourd’hui et de demain
Le Journal des Français à l’étranger remercie l’Ordre des ingénieurs du Québec pour son partage d’expertise sur ce dossier. Merci également au Pôle d’excellence de l’Industrie des systèmes électroniques du Québec (ISEQ), et particulièrement à Daniel Bindley, son directeur général, pour le temps précieux qu’il nous a consacré.