En 2030, l’Indonésie, la Chine et l’inde seront trois des quatre plus gros PIB mondiaux. L’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) représente aujourd’hui le 4e PIB mondial. Est-ce que les entreprises françaises et européennes ont pleinement et concrètement saisi que le cœur de l’économie mondiale est en Asie pour les décennies à venir ?
François Corbin (F.C.) : Je pense que les entreprises françaises ont pour la plupart bien saisi que, selon toute vraisemblance, l’essentiel de la croissance mondiale se localisera en Asie dans les prochaines décennies. La taille comparative des différents pays incite naturellement à étudier en priorité les développements en Chine et en Inde.
L’ASEAN est bien évidemment plus fractionnée, mais c’est à mon avis un marché sur lequel il est particulièrement aisé de s’installer. Je suis d’ailleurs frappé de voir le taux important de réussite des entreprises françaises qui se sont intéressées à cette zone. Je remarque également que quand une entreprise met un premier pied dans un pays de l’ASEAN, elle se développe très fréquemment dans d’autres pays de la région, avec succès bien souvent.
Toujours dans le même ordre d’idée, que signifie l’ASEAN pour l’Europe et les entreprises européennes ? Quelles sont les ambitions envers un marché jeune de 240 millions de personnes ?
F.C. : L’ASEAN présente structurellement de nombreux atouts, qui ne sont malheureusement pas suffisamment connus de mon point de vue. Ces pays se sont ouverts au monde dans les décennies passées. Ils ont ainsi renforcé leur stabilité économique et attiré les investissements étrangers, favorisant l’émergence d’une classe moyenne et développant les compétences de leurs habitants.
« Une base compétitive pour produire et exporter »
L’ASEAN présente donc conjointement deux avantages majeurs. Tout d’abord de constituer une base compétitive pour produire et exporter, en Asie notamment. Ensuite d’offrir un marché intérieur en croissance et de plus en plus attractif. La classe moyenne voit en effet ses attentes évoluer, non seulement quantitativement, mais aussi qualitativement, avec des attentes de qualité et de sécurité d’usage croissantes. Or dans ce domaine, l’Europe et la France en particulier, jouissent d’une image particulièrement forte et favorable. L’ASEAN est donc une zone d’exportation propice pour nombre d’entreprises françaises. L’essentiel de ma mission consiste du reste à mettre en évidence ces atouts pour inciter les entreprises à s’intéresser de plus près à la zone. Je rajouterai que les interrogations en cours sur les relocalisations des chaines de valeur devraient naturellement inciter encore davantage les entreprises à se tourner vers l’ASEAN
Le Cambodge est souvent traité sous les angles de la corruption et des droits de l’Homme. Le Cambodge cependant se modernise aussi à toute vitesse. Comment faire percevoir aux Européens une autre réalité ? Celle par exemple de la profonde mutation des infrastructures du pays ?
F.C. : Vous abordez la question de la corruption ; c’est un sujet qui ne peut être ignoré. Je sais pour l’avoir pratiqué, qu’une entreprise occidentale peut parfaitement se développer et prospérer tout en appliquant des principes éthiques parfaitement rigoureux. Je dirai même que c’est un atout à long terme pour une entreprise de développer des pratiques extrêmement strictes en la matière. Je ne pense donc pas que cette question soit de nature à décourager les entreprises de s’installer au Cambodge. Le Cambodge évolue, met en place un cadre réglementaire attractif ; Je crois stout simplement que ce pays ne vient pas naturellement dans « l’écran radar » des décideurs, par manque de connaissance des opportunités qui s’y présentent. Parlons-en donc !
Le Cambodge, un contexte réglementaire particulièrement favorable
Quelles sont, selon vous, les raisons de la timidité des entreprises françaises pour s’installer au Cambodge véritable porte-ouverte sur l’ASEAN et l’Asie ?
F.C. : Comme je l’évoquais auparavant, l’ASEAN manque de notoriété au sein de certaines de nos entreprises. Je commencerais donc par dire que la question est plus large que le Cambodge lui-même. Cela dit, quand une entreprise décide de se développer en ASEAN, le réflexe naturel sera fréquemment de se tourner vers des pays de la zone bénéficiant d’un marché propre de plus grande taille de par sa population. Cela dit, le Cambodge peut compenser sa petite taille par un contexte réglementaire particulièrement favorable à l’implantation d’entreprises étrangères et par sa position géographique proche de deux marchés significatifs, la Thaïlande et le Vietnam. Et ceci est souvent insuffisamment connu.
Quels atouts le Cambodge doit mettre en avant pour convaincre les entreprises françaises et européennes de venir ?
F.C. : Le Cambodge peut justement mettre en évidence ce contexte favorable aux entreprises, et s’afficher comme une porte aisée, compétitive et efficace pour exporter en ASEAN et plus généralement en Asie et dans le monde
En tant que représentant du ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères pour les relations économiques avec les pays de l’ASEAN, comment voyez-vous le développement des relations économiques entre les deux régions pour les 20 ans à venir ?
F.C. : L’une des grandes priorités de politique étrangère de la France ces dernières années a été de se doter d’une stratégie pour l’Indopacifique. Il s’agit de prendre acte de l’importance de plus en plus marquée des enjeux géopolitiques, économiques, environnementaux et maritimes de cette région, et du rôle spécifique de la France, qui y possède des territoires et des intérêts majeurs. Un rôle central est reconnu à l’ASEAN par cette stratégie, notamment par son volet économique. Je me suis moi-même impliqué pour expliciter à plusieurs occasions l’atout que cette stratégie indopacifique constituait pour nos entreprises.
Intensifier les synergies entre la France et l’ASEAN
Je suis convaincu que les autorités de notre pays et notre communauté d’affaire vont de ce fait intensifier leur approche conjointe et synergique pour développer la connaissance mutuelle des autorités, et des communautés d’affaires, entre la France et les pays de l’ASEAN. J’ai moi-même pu mesurer l’impact très positif de délégations d’entreprises accompagnant des visites ministérielles. Je m’emploierai à en développer d’autres à l’avenir.
Qu’attendez-vous de ce premier forum des Affaires France Cambodge ?
F.C. : Vous aurez très certainement retenu de mes propos que je suis convaincu de l’intérêt mutuel que la France et le Cambodge, et plus généralement l’ASEAN ont conjointement à mieux se connaître. Ce forum représente une opportunité très pertinente en la matière. C’est une occasion pour les entreprises françaises implantées dans la région de mieux appréhender les réalités du marché cambodgien tout en pouvant nouer des contacts directs avec les décideurs locaux, mais il fournit également l’occasion à notre communauté d’affaires de mieux faire connaître, à ces décideurs, la diversité, la qualité et la valeur ajoutée des entreprises. Les frontières s’ouvrent à nouveau après la crise sanitaire que nous avons connue, le Cambodge a été l’un des premiers à lever toutes les restrictions, et le moment est donc propice pour se rencontrer physiquement. Je félicite ceux qui en ont pris l’initiative et me réjouis d’y participer.
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