Thomas Bassetto ne voulait plus vivre à Paris. En 2013, il projette alors de partir à l’étranger, pour vivre une nouvelle expérience. Par hasard, sa femme et lui décrochent un emploi à Oslo, en Norvège. « On s’est dit : “pourquoi pas ?’ Et on a fait nos valises”, raconte-t-il. Le couple quitte alors la France pour un an. Il n’est plus jamais reparti. La qualité de vie offerte par le pays l’a convaincu de rester. Le parcours de Thomas Bassetto nourrit le récit, véhiculé par les rapports et études en tout genre depuis des années, d’un territoire où il fait bon vivre. La Norvège se classe en effet à la 8e place du dernier classement mondial sur le bonheur, réalisé sous l’égide des Nations unies. Ses voisins scandinaves, le Danemark et la Suède occupent respectivement le deuxième et 7e rang. À titre de comparaison, la France occupe cette année la 20e place.
La majorité du classement évolue en fonction des années, mais le top 10, lui, a peu changé depuis la première parution du rapport en 2012. La Scandinavie y occupe toujours les premières places. Les raisons qui expliquent ce phénomène sont nombreuses : un PIB par habitant conséquent, une vie sociale développée, une espérance de vie en bonne santé élevée et une faible corruption sont parmi les critères qui permettent aux Scandinaves d’accéder au bonheur plus facilement qu’ailleurs. Régulièrement cités par les expatriés installés dans la région, le quasi parfait équilibre entre vie professionnelle et vie privée et l’accès à la nature constituent également des atouts indissociables de la Scandinavie.
En Norvège, l’allemannsretten (le « droit d’accès à la nature » en français) est d’ailleurs inscrit dans la loi depuis 1957. Il garantit à tous ses habitants de pouvoir se rendre sur la plupart des « terres non clôturées », comme les forêts, les rivages, les marais et les montagnes. À Oslo par exemple, seulement 20 minutes de tramway séparent le cœur de la ville de la station de ski d’Holmenkollen. Nombreux sont les habitants à quitter le travail, ski sur l’épaule, le soir venu. Un privilège inaccessible dans les autres capitales européennes et du monde.
Des inégalités grandissantes
Mais ce mode de vie, érigé en modèle à l’international, ne serait-il pas l’apanage d’une seule partie de la population ? Si, en Norvège, le revenu moyen des ménages est nettement supérieur à la moyenne des pays de l’OCDE, « un écart considérable sépare désormais les plus aisés des plus modestes », affirme l’organisation. Ainsi, « les 20% les mieux lotis touchent quatre fois le montant perçu par les 20% les moins bien lotis. » La Suède, quant à elle, tend à rattraper la moyenne des pays de l’OCDE en termes d’inégalités. L’indice de Gini, utilisé de 0 à 1 pour mesurer l’inégalité des revenus d’une population, y est passé de 0,226 en 1991 à 0,320 en 2011. D’après Francis Perrin, ancien conseiller à l’ambassade de France en Suède, « le système de redistribution est moins efficace qu’avant […], les prestations sociales ont diminué et les conditions d’éligibilité sont devenues plus strictes », expliquait-il dans l’article « Des inégalités croissantes en Suède… », publié en 2014.
Le coût de la vie, grandissant, devient prohibitif pour une partie de la population. « Depuis que je suis arrivée il y a seize ans, les prix n’ont fait qu’augmenter, confie Noémie Altschul, conseillère des français de l’étranger, en Suède. À Stockholm, la vie est très agréable… si on a les moyens. La pénurie de logements dans la capitale rend l’immobilier très difficile d’accès. » Alexandre Hoyrold, député des Français de l’étranger pour l’Europe du Nord confirme : « Le prix de l’immobilier est par endroit exorbitant. Payer un loyer ou acheter un bien reste difficile pour tout le monde, assure-t-il. Je pense que c’est un sujet auquel doivent rapidement s’atteler les gouvernements scandinaves. »