C’est sous une pluie fine, typiquement londonienne, que la foule, au soir du jeudi 8 septembre, a commencé à déposer des milliers de bouquets de fleurs, en hommage à la souveraine Elizabeth II, disparue quelques heures plus tôt, à Balmoral en Écosse.
Originaire de Barneville-Carteret en Normandie, Nathalie Augé est professeure de français dans un collège pour adultes de Covent Garden, un quartier de Londres, et la nouvelle l’a secouée : “J’ai eu les larmes aux yeux quand je l’ai appris, confesse-t-elle. Cela fait 33 ans que je suis en Angleterre et je me suis attachée à cette femme. On avait envie de la respecter pour ce qu’elle faisait. On peut ne pas être monarchiste, je suis une républicaine, je suis une Française, mais je respectais énormément ce qu’elle faisait pour son pays, ça donnait un sens de continuité.”
Elizabeth II sera donc restée sept décennies au pouvoir, un record de longévité sur le trône britannique. Nathalie Augé ajoute : “J’écoutais une conversation d’une femme dans la rue qui disait : ‘vous vous rendez compte, 70 ans, je n’ai connu qu’elle, mais depuis que son mari est décédé, on voyait bien qu’elle descendait’. Elle a tenu jusqu’à son jubilé et je pense que les Anglais s’y attendaient sans s’y attendre. Ils avaient du mal à percevoir qu’elle pouvait les quitter mais en même temps, on la voyait devenir de plus en plus frêle. Et depuis le départ de son mari, elle, elle participait moins.”
Succéder sans décevoir
Elizabeth II avait accédé au trône en 1952, à l’âge de 25 ans. Vénérée par le peuple britannique, cheffe des armées du Royaume-Uni, la reine a traversé les époques et laissé quelques traces dans les familles. “J’ai une de mes collègues qui m’a dit : mon deuxième prénom, c’est Elizabeth”, rapporte Nathalie Augé. On a donné à beaucoup de petites filles le nom de Elizabeth en hommage à la reine, donc elle était vraiment très présente.”
C’est son fils, Charles III, qui devient roi du Royaume-Uni, à l’âge de 73 ans, avec le défi de succéder sans décevoir. Une figure complexe, sensible et souvent moquée, destinée dès sa naissance à régner, mais restée dans l’antichambre du trône et dans l’ombre de sa mère pendant des décennies. C’est en tout cas un changement radical assure la Française : “Charles est un personnage complètement différent de sa mère. C’est quelqu’un qui a défrayé la chronique sur certaines choses. Mais en même temps, c’est un homme très intelligent, peut-être un petit peu plus moderne que sa mère. On tourne une page. Charles, c’est un peu un point d’interrogation.”
Les funérailles, grandioses, d’Elizabeth II, auront donc lieu lundi prochain, 19 septembre, dans huit jours exactement, à l’abbaye de Westminster à Londres. D’ici là, le temps sera comme arrêté. De nombreux événements sportifs mais aussi des défilés de mode prévus la semaine prochaine à l’occasion de la Fashion Week de Londres, ont été reportés. Les cheminots et postiers ont suspendu leurs grèves prévues pour dénoncer le coût de la vie. Lire et écouter la chronique ici
Entretien réalisé par Julien Langlet