Les manifestations de cette semaine en Chine laisseront des traces. Certains n’hésitent pas à les comparer à celles de la place Tian’anmen en 1989 à Pékin. Benoît Viguier n’est pas loin de penser la même chose : « C’est assez hallucinant et je pense que même vu d’ici, c’est aussi incroyable parce que c’est relativement du jamais vu en tout cas depuis depuis un bon moment c’est. C’est clairement un ras le bol des gens. Quand on voit ça, on le comprend, mais il y a toujours cet étonnement. »
Depuis trois ans en effet, la population de Shanghai est soumise à des confinements stricts répétés, et à des tests anti-Covid quasi-quotidiens. Benoît Viguier vit depuis quelques années à Shanghai. Originaire du Pas-de-Calais, employé comme designer pour un équipementier automobile, il a vécu de l’intérieur toutes ces contraintes sanitaires : « On s’habitue. On dit que le peuple chinois est assez résilient, et c’est vrai, on le sent. Ils ont tendance à faire des efforts, à se plier aux règles. Mais il n’empêche que chez tout peuple y un point de rupture, et on en approche, surtout chez les gens les plus aisés, la classe moyenne qui pourrait voyager et qui ne peut pas le faire aujourd’hui. »
Car outre ces restrictions quotidiennes, les ressortissants chinois ne peuvent toujours pas sortir de leur pays. Même d’une région à l’autre, les déplacements sont compliqués et coûteux.
Réserves de nourriture
À Shanghai, le déclencheur des manifestations de cette semaine a été une cérémonie d’hommage aux 10 victimes de l’incendie d’une tour d’habitation dans le Xinjiang le mois dernier, en plein confinement.
Benoît Viguier ajoute : « Forcément le monde attire le monde et ça a grossi un peu plus, et il y a un peu plus de revendications qui sont arrivées, explique le Français. Au-delà de la réunion en mémoire de cet événement, il y a eu un peu plus de sujets qui sont arrivés sur la table pendant ces manifestations. »
Ici, les habitants ont dû supporter un confinement complet de 67 jours d’affilée, et si les gens protestaient peu, c’était par peur, mais la parole, aujourd’hui, s’est libérée. Le rebond épidémique du coronavirus se poursuit en Chine avec un taux de circulation inédit depuis le confinement de Shanghai au printemps 2022. Résultat : plusieurs ambassades, dont la France et les États-Unis ont demandé à leurs ressortissants de faire des réserves de nourriture au cas où cet hiver.
Une grande majorité des étrangers vivant en Chine a d’ailleurs quitté le pays. De nombreux petits commerces ont été obligés de mettre la clef sous la porte. Après près de sept années passées à Shanghai, Benoît Viguier, 32 ans, et sa compagne, avaient de toutes façons choisi de rentrer, mais le Français reconnaît que la crise du Covid a accéléré leur décision. Ils s’apprêtent donc à quitter Shanghai d’ici la fin du mois. Lire et écouter la chronique ici