Français à l’étranger : Quels sont les enjeux pour la commission que vous présidez depuis la dernière session plénière de l’AFE ?
Jean-Hervé Fraslin : Lors de la session d’octobre 2022, nous avons notamment travaillé sur la question du réseau de libraires français à l’étranger qu’il faut maintenir, et aussi sur la question de la santé mentale des élèves après les confinements. Nous nous sommes concertés pour réfléchir aux dispositifs d’accompagnement les plus avancés. C’est notre rôle : identifier les meilleures pratiques dans les pays où nous vivons et les recommander comme sources d’inspiration pour les diffuser dans le plus grand nombre de pays possible. Concernant par exemple la gestion des établissements français, j’ai pu observer à Madagascar une école créée et administrée par les parents d’élèves. C’est un mode de fonctionnement que je pense plus adapté parce que les parents sont des personnes en immersion profonde, de longue durée dans le pays, mieux intégrés à l’économie locale que des administrateurs qui seraient en détachement sur de courtes périodes.
Français à l’étranger : L’AEFE a un objectif de doublement des effectifs d’ici 2030. Que recommandez-vous à ce sujet en tant que commission de l’enseignement ?
Jean-Hervé Fraslin : L’enseignement occupe une place prépondérante dans cette commission. Comme pour les Alliances françaises – qui relèvent aussi de nos attributions – l’action est souvent trop concentrée dans la capitale. Même s’il y a un grand réseau de 566 écoles françaises, il n’y en a pas partout. On a l’impression qu’en étant influent dans la capitale, on est influent dans tout le pays. Mais avec l’expérience du terrain, on se rend compte que la majorité des politiques au Parlement ou dans les ministères ne viennent pas de la capitale mais d’endroits où il n’y a ni écoles françaises ni Alliances françaises. Il faudrait densifier notre réseau au niveau local et régional, non pas en créant plus d’établissements en gestion directe mais en faisant de l’immersion : conclure des accords avec des écoles et des institutions existantes, et y développer une section française. C’est la meilleure manière de développer notre influence : la rendre plus diffuse, mais plus puissante. Cela permettrait aussi de faire des économies d’immobilier et de personnel, et donc de réduire les frais de scolarité.
Français à l’étranger : Concernant les frais de scolarité justement, quelles seraient les pistes pour réduire ceux des établissements en gestion directe ?
Jean-Hervé Fraslin : C’est un vrai souci. Le contexte d’inflation, de déstabilisation des prix des matières premières, de l’énergie et des parités monétaires a des effets sur le fonctionnement des établissements. Nous risquons d’avoir affaire à des ajustements de tarifs potentiellement brutaux et de perdre des élèves. Pour limiter ce phénomène, nous avons commencé à poser cette question de l’augmentation des frais de scolarité pour chercher à ce qu’elle soit limitée au montant de l’inflation. Nous avons aussi demandé à ce que les bourses scolaires soient augmentées au moins à la hauteur de l’inflation pour les familles qui n’ont pas la capacité de supporter ces hausses. D’ailleurs l’ensemble de ces dispositifs de bourses fera l’objet d’une étude que nous espérons présenter à la session de mars. Ce sera l’un des projets importants, avec la francophonie -le mois de mars sera dédié à cette thématique- sujet sur lequel nous comptons organiser une table ronde.