La retraite à 65 ans est déjà une réalité en Suisse. A compter de janvier 2025, les femmes, qui, jusqu’à présent, avaient le droit de partir à 64 ans, devront travailler un an de plus. En septembre dernier, les Suisses ont voté en faveur de l’alignement de leur âge de départ, sur celui des hommes.
Et c’est passé d’un cheveu, avec 50,6% de « oui » »à la réforme, tant le sujet est explosif, explique Stéphane Auckenthaler. Le Français vit depuis cinq ans à Genève, où il a créé et dirige la filiale d’une société de services informatiques. « Ça crée quand même quelques polémiques parce qu’on touche quand même aussi le côté natalité de la femme, le côté ‘faire des enfants’. Et en Suisse, la femme est peut-être moins encline à travailler. Il y a quand même une partie de la population qui est assez riche pour permettre aux femmes de ne pas travailler. Donc, il y a eu un gros changement dans les années précédentes, concernant le travail des femmes d’une part. Et puis donc cette égalité aussi bien salariale que de retraite. »
C’était la condition sine qua non, selon Berne, pour stabiliser le système des retraites, qui n’avait pas changé depuis 1995. Cela ne signifie pas que les gouvernements précédents n’ont pas essayé de réformer, mais les Suisses ont toujours refusé, dans les urnes, qu’on touche à un système qui repose sur trois piliers, entre répartition et capitalisation, selon le Français : « Le premier pilier est fédéral, c’est une petite part de la retraite. Le deuxième pilier est partagé entre l’employeur et l’employé, et représente la majorité de la retraite, et après, à titre personnel, il y a l’équivalent de ce que pouvait être un Perp à l’époque, c’est à dire un troisième pilier qui est donc là uniquement privé, et qui est fait sous forme de capitalisation. »
Débat de compétences
Quant au problème de l’emploi des seniors qui fait débat chez nous, ce n’est pas un sujet ici, affirme le Français : « Il y a des gens qui travaillent, mais en plus qui apportent une expertise. Les gens se forment au cours de la vie, et quand ils ont une expertise, ils sont sollicités pour ça. Donc il y a des gens qui travaillent effectivement à plus de 65 ans. C’est un débat de compétences. Le contrat de travail en Suisse n’est pas sécuritaire. Donc si vous avez une compétence qui est reconnue à 70 ans, eh bien on vous fera confiance pour pouvoir apporter votre valeur ajoutée. »
La réforme adoptée en septembre dernier, permettra également à tous les travailleurs de partir à la retraite de manière plus flexible entre 63 et 70 ans. Le passage progressif de la vie active à la retraite sera facilité, grâce à la possibilité d’anticiper ou d’ajourner une partie de leur rente. En Suisse, pas de manifestation monstre, ni de grève sans fin. L’allongement de la durée de travail est vécu ici comme une conséquence de l’augmentation de l’espérance de vie.
On a donc regardé avec stupéfaction ce qui s’est passé en France autour de la réforme : « Il y a le volume, qui est colossal, et il y a l’incompréhension de se dire, de toute façon, la longévité des salariés est telle, que ça doit évoluer dans ce sens-là. Le modèle ne peut pas évoluer autrement, et c’est la première étape avant autre chose, dans peut-être 15 ou 20 ans. »
Mais tout le monde ne roule pas sur l’or en Suisse. Ainsi, certains retraités aux revenus modestes divorcent pour gagner une meilleure retraite. Une séparation seulement devant la justice, puisqu’ils continuent de vivre ensemble. Lire et écouter la chronique ici