Français à l’étranger: Quand et pourquoi le lycée international de Londres Winston Churchill a-t-il été créé ?
Mireille Rabaté : Notre établissement a ouvert en septembre 2015 dans des bâtiments achetés par la fondation French Education Charitable Trust (FECT). L’idée était d’offrir la possibilité de passer le baccalauréat français à un plus grand nombre d’élèves, qu’ils soient Français ou étrangers. À l’ouverture, notre établissement comptait 460 élèves. Ils sont désormais presque 850, sachant que nous disposons de locaux pour en accueillir jusqu’à 1200. En 2015, nous n’avions pas tous les niveaux. C’est désormais le cas : depuis 2018 nous proposons une scolarité de la petite section de maternelle jusqu’à la terminale. Aujourd’hui, nous comptons 230 élèves en maternelle et primaire, 270 au collège et 345 au lycée. Parmi eux, il y a 56% de Français, 19% de binationaux, 12% de Britanniques et 13% d’internationaux.
Vous proposez un enseignement bilingue. Comment cet enseignement est-il dispensé en fonction des classes ?
Mireille Rabaté : L’enseignement est totalement bilingue entre 3 et 11 ans. Chaque classe a deux instituteurs : un francophone et un anglophone. Ainsi, les cours sont en anglais le matin et en français l’après-midi, ou inversement. L’objectif est de permettre à chaque élève de penser dans les deux langues et de s’approprier les deux cultures, sachant que certains d’entre eux arrivent dans notre établissement sans parler ni le français, ni l’anglais. À partir de la sixième, ils optent pour une langue dominante. S’ils choisissent le français, c’est pour préparer le baccalauréat français ou le bac français international. Si c’est l’anglais, ils passeront les IGCSE suivi par l’IB, le bac international. Dans les deux cas, ils continuent néanmoins à avoir des cours dans l’autre langue, avec toujours cet objectif d’en faire des adultes totalement bilingues et qui maîtrisent les deux cultures.
Concernant l’ouverture au monde justement, vous avez mis en place des « opening minds classes » (« classes d’ouverture d’esprit » en français, ndlr). De quoi s’agit-il ?
Mireille Rabaté : C’est notre marque de fabrique. Entre la sixième et la troisième, les élèves suivent obligatoirement des cours qui vont au-delà du programme officiel. Les professeurs y enseignent des notions parfois complexes : il y a par exemple eu un cours sur l’histoire anthropologique de la sorcellerie. Un autre portait sur la biologie vue à travers le prisme de la médecine. Ces classes sont en français ou en anglais et les élèves peuvent choisir celles qu’ils veulent suivre. Il n’y a pas de devoirs ni de notes, c’est juste pour le plaisir d’apprendre.
Le bien-être de l’élève est au cœur de votre pédagogie. Comment ?
Mireille Rabaté : L’ensemble de l’équipe pédagogique veille quotidiennement au bien-être des élèves : infirmière, surveillants, etc. Nous avons par ailleurs deux « visiting dogtor », des chiens qui viennent une à deux fois par semaine depuis 2016. Ils sont certifiés et ont été spécialement dressés pour accompagner les adolescents au cours de sessions individuelles ou de groupe : leur présence est très efficace pour combattre le stress et le manque de confiance que peuvent ressentir certains élèves. Cette initiative a beaucoup de succès.
Vous mettez en avant une pédagogie innovante qui mise sur l’autonomie des élèves. Par quels biais ?
Mireille Rabaté : Nous avons à temps plein un directeur de recherche pédagogique. Ensuite, dans notre établissement, les professeurs sont là pour accompagner les élèves dans leur apprentissage, pas pour faire cours. Ils y apprennent à s’interroger sur le monde, à comprendre qu’il y a parfois plusieurs réponses à une question, à se lancer dans des projets, rater, puis s’y remettre. Cela passe par les moments en classe, mais aussi par les activités que nous proposons comme le sport, le jardinage, la musique, etc. Les élèves peuvent par ailleurs prendre des initiatives en créant ou s’inscrivant dans différents clubs : clubs de lecture, d’échecs, de sport, etc. Tous nos élèves peuvent par ailleurs profiter de nos deux hectares d’espaces verts au quotidien.