C’est le grand thème de la campagne. En Turquie, le pouvoir d’achat fond à vue d’œil, sous l’effet d’une inflation explosive. Le prix de l’oignon, un ingrédient de base dans les cuisines de 85 millions de Turcs a ainsi quadruplé en un an, pour atteindre presque 3 € le kilo, quand le salaire minimum, relevé fin janvier de plus de 50%, ne dépasse pas 400 €.
Jean-Michel Foucault vit depuis 1985 à Istanbul, où il dirige l’agence de tourisme d’affaires qu’il a créée. Il confirme que les prix ont explosé ces derniers mois en Turquie : « Un déjeuner ou un dîner qui coûtait l’équivalent de dix euros il y a deux ans, aujourd’hui, il coûte trente euros, donc c’est énorme. »
Mardi 9 mai dernier, Recep Tayyip Erdogan annonçait une hausse de 45%, à partir de juin, des salaires des employés de la fonction publique. Le président sortant multiplie depuis quelques mois les cadeaux à une population excédée par l’inflation et la chute du pouvoir d’achat. Cette situation ajoute aux inquiétudes sur la régularité des opérations électorales et «l’état de la démocratie» en Turquie, a prévenu le Conseil de l’Europe, qui y dépêchera 350 observateurs, en plus de ceux désignés par les partis dans les 50.000 bureaux de vote. « Il y a beaucoup de monde prêt à se mobiliser pour être dans les bureaux de vote au moment du dépouillement, observe le Français. Il va y avoir des gens qui vont accompagner la police, qui transporte les urnes dans les bus de la municipalité jusqu’aux préfectures ou sous-préfectures, d’un endroit à l’autre. »
Les droits des femmes en recul
Jérôme Benoît vit lui dans la partie asiatique d’Istanbul depuis trois ans. Originaire de Lyon, à 39 ans, il est marié à une Turque, responsable marketing dans une société américaine. Et selon son épouse, les droits des femmes ont connu un grand recul en Turquie, durant les 20 ans passés au pouvoir par Recep Tayyip Erdogan : « S’il y a des violences faites aux femmes, il n’y a plus de risque aujourd’hui pour les maris, peine encourue : zéro, alors que c’était justement une des fiertés qu’elles avaient d’avoir été protégées par les anciens gouvernements, toutes ces avancées qui avaient été faites, pour elles, ça marque un gros retour en arrière. »
Fan de sport, c’est lors de matchs de volley sur les plages d’Istanbul, que Jérôme Benoît croise les jeunes Turcs. Ils sont un peu plus de 5 millions à être appelés aux urnes ce dimanche 14 mai, pour la première fois. Et c’est pourtant à l’étranger que la plupart voient leur avenir : « Ils veulent tous partir, témoigne le Français . Leur première volonté, c’est de trouver un moyen d’aller vivre ailleurs et de commencer leur vie. Ils sont tous chez leurs parents, parce qu’ils ne peuvent pas se loger, même s’ils ont tous un travail. Après leurs études, c’est le service militaire directement, donc après il va falloir trouver un emploi. Même ceux qui ne parlent pas très bien anglais, leur volonté c’est d’apprendre l’anglais comme il faut, et d’aller voir ailleurs. »
Ils rêvent de Dubaï, de la France et bien sûr de l’Allemagne, où se trouve la plus importante communauté turque d’Europe. Lire et écouter la chronique ici