Actualités internationales
Comment les Émirats préparent la neutralité carbone
En 2021, Les Émirats arabes unis ont annoncé la création de l’initiative stratégique Net Zero 2050. Le pays, qui figure parmi les principaux exportateurs de pétrole au monde, devient ainsi le premier pays du Golfe à déclarer sa volonté de réduire à zéro les émissions nettes de carbone de ses activités.
« Nous avons lancé une initiative stratégique visant à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 », a annoncé le 8 octobre 2021 Mohammed ben Zayed, prince héritier d’Abu Dhabi. « Nous tenons à soutenir les efforts de la communauté internationale pour parvenir à un développement durable […] et contribuer au bien de l’humanité », a-t-il déclaré à l’Agence de presse des Émirats. Cette annonce en a surpris plus d’un. En effet, le pays du Moyen-Orient a un mode de vie très énergivore.
L’empreinte carbone des EAU par habitant est, selon l’organisation Global Carbone Project l’une des plus élevées au monde, avec 21,79 tonnes de CO2 par habitant en 2021. À titre de comparaison, les Français émettent en moyenne 4,74 tonnes de CO2 par an par personne, un chiffre proche de la moyenne mondiale. De plus, les experts estiment qu’il faudrait limiter ce chiffre à 2 tonnes de CO2 par an pour atteindre la neutralité carbone et ainsi limiter le réchauffement de la planète. Pourtant, selon le gouvernement local, les Émirats arabes unis devraient bientôt rimer avec énergies vertes et protection de l’environnement.
Une initiative stratégique
Devenir le premier pays du golfe Persique à atteindre la neutralité carbone amènerait le membre de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) à s’aligner sur l’Accord de Paris sur le climat qui vise à limiter l’augmentation des températures mondiales à 1,5°C par rapport aux niveaux préindustriels. Cette initiative stratégique est nommée Net Zero 2050. Les EAU ont notamment annoncé investir dans les trente prochaines années 600 milliards de dirhams, soit 153 millions d’euros dans les énergies propres et renouvelables – qu’ils comptent tripler.
Le concept de « net zéro carbone » permettrait d’équilibrer les besoins de développement économique à ceux d’un environnement sain. Ainsi, au lieu d’arrêter complètement les émissions en CO2, cela consiste à développer des mécanismes qui permettent d’absorber autant de CO2 que les quantités produites. Pour Aude-Solveig Epstein, spécialiste en droit de l’environnement et professeur invitée à NYU Abu Dhabi, le but des EAU n’est pas d’arrêter totalement la production d’énergies fossiles, mais de « diminuer les émissions qui y sont liées par différents moyens, comme la capture et le stockage des émissions ».
« On ne peut pas simplement fermer le robinet »
Alors, les EAU vont-ils devenir champions en développement durable ? Pas sûr. Depuis les années 1950, le pétrole et le gaz ont façonné le paysage économique du pays. Et les hydrocarbures qui font sa richesse continueront à être extraits et exportés. Dans l’objectif Net Zero 2050, les émissions provenant de la combustion de carburants fossiles ne sont pas incluses. De plus, ce plan ne concerne que les émissions nationales, sans compter celles issues de la combustion du pétrole exporté par le pays, qui produit environ trois millions de barils par jour selon l’Opep.
Techniquement, les EAU pourraient donc atteindre le zéro net tout en continuant d’investir des milliards dans l’extraction de pétrole. La production continuera « tant qu’elle est nécessaire », a confirmé la ministre émiratie du Changement climatique et de l’Environnement Mariam Almheiri, sur la chaîne CNN : « On ne peut pas simplement fermer le robinet. C’est une transition. » Pour Charlotte Meyer, chercheuse en adaptation au réchauffement climatique, cette décision est un « contresens » : « Les Émirats se sont engagés à tripler leur production d’énergies renouvelables tout en continuant à multiplier la production des énergies fossiles. Pour moi, c’est du greenwashing. »
De gigantesques centrales solaires
Pour atteindre leur objectif, les EAU vont, et ont déjà investi dans de nombreux domaines. Entre autres, le solaire. Et du soleil, il y en a au pays des sept Émirats. À ce sujet, le pays compte installer plus de 9 GW de capacité solaire d’ici 2030. Les Émirats se sont engagés à faire passer ce type d’énergie propre de 7% aujourd’hui à 75% de la consommation énergétique du pays en 2050.
Par exemple, située dans le désert de Dubaï, la centrale solaire Mohammed ben Rashid Al-Maktoum devrait, à la fin de sa construction en 2030, produire suffisamment d’énergie pour alimenter 1,3 million de logements, ce qui réduirait les émissions de carbone de 6,5 millions par an, selon la Dubai Energy and Water Authority. Il s’agira d’une des plus grandes centrales solaires du monde.
Un système de transport public fiable et efficace
À la suite du boom pétrolier, les routes se sont multipliées et les EAU sont rapidement devenus un pays centré sur la voiture. Dans le cadre de l’initiative stratégique Net Zero 2050, l’Autorité des routes et des transports de Dubaï (RTA) a dévoilé une stratégie pour minimiser son empreinte carbone, notamment dans les transports publics. L’Autorité vise à réaliser la décarbonisation de tous les véhicules publics. Par exemple, dans le cadre de cette initiative, 10% des bus publics doivent être convertis à l’électricité et à l’hydrogène d’ici 2030, et 100% d’ici 2050.
Les Émirats souhaitent aussi aider les habitants à se débarrasser de leur voiture grâce à un système de transport public efficace. Aude-Solveig Epstein se montre sceptique à cet égard : « Le pays a été développé autour de la voiture. À Abu Dhabi par exemple, des autoroutes à cinq voies sillonnent la ville de part en part, tandis que le bus passe toutes les 2h. Il y a beaucoup de projets, comme un projet de train entre les différents Émirats, ou encore d’étendre le métro de Dubaï, mais sur le terrain on ne les voit pas encore émerger. »
« Les habitants sont dépendants de la climatisation »
Selon le World Resources Institute, les bâtiments représentent 32% de la consommation mondiale d’énergie. Ces chiffres sont encore plus alarmants pour un pays comme les EAU, où « les habitants dépendent fortement des climatiseurs », comme le souligne Charlotte Meyer. Les étés y sont torrides, avec des températures moyennes comprises entre 35 et 45 °C, selon la base de données Données mondiales. Les bâtiments des EAU consomment environ 75% de toute l’électricité produite dans le pays.
EAU prévoient de lancer de nombreuses initiatives à ce niveau au cours des prochaines décennies. The Sustainable City à Dubaï (la ville durable), est un projet immobilier de 46 hectares. Cette ville compacte, terminée en 2018 et alimentée par l’énergie solaire nécessite un minimum d’eau et d’énergie, tandis que sa conception de pointe vise à maximiser la qualité de vie. Il s’agit du premier développement à consommation énergétique nette zéro aux EAU.
Un paradoxe énergétique
Les Émirats ont certes prévu de dépenser des milliards d’euros pour les énergies renouvelables jusqu’à 2050. Mais dans le même temps de nouveaux gisements de gaz naturel découverts ces dernières années continuent d’être exploités. Un paradoxe qui se retrouve aussi au niveau de la consommation en eau du pays : malgré les projets de réduction du gaspillage de cette ressource, le pays conserve ses pistes de ski en plein désert, de nombreux terrains de golf et consomme toujours trois fois plus d’eau par habitant qu’en France, selon le site Perspective Monde.
« Le gouvernement des EAU ne présente pas assez concrètement ses projets, explique Charlotte Meyer. Il n’y a pour l’instant aucune feuille de route. » Un manque de transparence souligné par le Climate Action Tracker, groupe de recherche qui suit les actions des gouvernements pour parvenir à leur réduction des émissions de gaz à effet de serre au regard des accords internationaux. « En mars 2023, les Émirats n’avaient pas encore soumis de stratégie à long terme à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques », indique le groupe de recherche.
Toutefois, Charlotte Meyer reconnaît une « avancée dans les discours » même si celle-ci « reste très timide ». Aude-Solveig Epstein confirme : « Je note quand même un très gros progrès dans leur communication. Le pays fait des efforts pour redresser la barre, mais cette transition n’est pas aussi brutale qu’elle devrait l’être si on devait s’aligner sur les trajectoires du Giec. »
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