Deux ans après, si dans certaines régions la vie semble avoir repris « normalement » et que l’État fonctionne, l’Ukraine reste sous la menace de frappes aériennes qui peuvent viser des immeubles d’habitation, des salles de classe ou des hôpitaux.
Arrivé il y a quatre ans comme directeur du Crédit Agricole en Ukraine, Carlos de Cordoue passe les deux tiers de son temps à Kiev, le reste à Paris. Deux ans après le début de l’invasion du pays par la Russie, il témoigne que la vie dans la capitale revient à la normale.
« On a même eu beaucoup de retours d’employées qui étaient en Pologne qui sont revenues s’installer à Kiev, assure-t-il. Par exemple, aux heures de pointe, les embouteillages sont revenus, les théâtres et les restaurants sont ouverts. Souvent ils affichent complet. Kiev a retrouvé sa population d’avant-guerre. »
La ville vit toutefois au rythme des sirènes d’alertes aériennes, plus d’un millier au total depuis le début de la guerre, il y a deux ans. Le Français observe par ailleurs un rebond de l’activité économique dans le pays, en particulier depuis la réouverture du corridor de la mer Noire. « Maintenant, les bateaux peuvent sortir librement, témoigne-t-il, ils ne sont même plus arrêtés dans le Bosphore, où il y avait les inspections russes. Donc, le flux d’exportations est reparti de façon assez vigoureuse, et on retrouve des niveaux assez élevés, non seulement pour les céréales, mais aussi par exemple l’acier, qui est une source d’exportation importante. L’activité est assez dynamique. »
Le moral tient bon
Si la banque a fermé sa douzaine d’agences situées en territoire occupé par la Russie, toutes les autres, plus d’une centaine au total, sont restées ouvertes. « On n’a pas repris pleinement l’activité de prêts aux particuliers, pour des raisons de risques, admet Carlos De Cordoue, mais on a repris nos activités de financement d’acquisition de véhicules. On est à peu près à 70 % du niveau d’avant-guerre en termes de production de crédits. Les clients ont les moyens aujourd’hui d’acheter une voiture et une partie de la population a les moyens de vivre et de consommer. »
Pour l’instant, il est impossible de dire combien d’Ukrainiens sont morts à cause de cette guerre, mais d’après le haut-commissaire de l’ONU pour les réfugiés, on estime qu’entre 3 et 4 millions de personnes ont dû quitter leur domicile, détruit par un drone ou une roquette. De l’aveu même cette semaine du président Voldymyr Zelensky, les forces militaires ukrainiennes sont dans une situation “extrêmement difficile” face à l’agresseur russe. La population de Kiev garde pourtant le moral, assure Carlos De Cordoue : « Les Ukrainiens continuent de penser qu’il faut se battre. Il n’y a pas d’idée défaitiste, à ce stade en tout cas. Le moral tient bon. Les gens restent avec l’idée que la victoire est possible. C’est assez étonnant, mais c’est vraiment ce que les gens pensent à Kiev en tout cas. »
Diplomates et analystes, à Moscou ou du côté de Kiev et ses soutiens, s’accordent au moins sur un point : 2024 sera encore une année de guerre. Lire et écouter la chronique ici