Français à l’étranger : Comment votre aventure en tant que conseillère du commerce extérieur a-t-elle commencé ?
Véronique Denis-Pelliet : Elle a commencé en 2013 à Shanghai lorsque je travaillais alors chez Orange. Cela faisait six ans que j’habitais en Chine, que je travaillais dans un environnement uniquement chinois. Lorsque j’ai été nommée pour cette mission bénévole (pour trois ans par décret du Premier ministre sur proposition du ministre chargé du Commerce extérieur, ndlr), j’y ai vu l’occasion de renouer avec la France et de mettre mon expertise au service des entreprises et de mon pays en général. Comme il s’agit d’un mandat personnel, lorsque j’ai déménagé à Singapour, j’ai intégré le comité de Singapour dont j’ai pris la présidence en 2019. Il y a plus de 4 500 conseillers économiques à travers le monde et nous sommes 65 à Singapour.
Les conseillers ont quatre missions bien définies : conseiller les pouvoirs publics, favoriser l’attractivité de la France, fournir des mentors aux entreprises et enfin favoriser l’emploi et la formation des jeunes français, avec les V.I.E. Comment travaillez-vous au quotidien ?
Il y a différents groupes de travail en fonction des expertises et domaines d’activités des conseillers. Lorsque je suis arrivée à Singapour par exemple, j’ai intégré un groupe de travail sur les fintech. Nous avons également publié un rapport sur la finance responsable. Aujourd’hui, notre thème prioritaire est le développement durable. C’est un sujet essentiel pour Singapour qui a pour ambition de devenir un hub régional d’expertise et de financement de la transition écologique et donc nous croyons qu’il y a là une carte à jouer pour nos entreprises françaises. Concernant l’attractivité de la France, c’est une mission que nous portons chacun auprès de nos propres entreprises et de notre réseau singapourien. Quant au soutien ponctuel d’entreprises et plus particulièrement de start-up, nous avons un partenariat avec la Chambre de commerce, un programme de « duo mentoring » pour accompagner les entreprises qui en auraient besoin sur des problématiques spécifiques. Enfin concernant les jeunes, notre but est bien sûr de les encourager à venir travailler à l’international avec la promotion notamment du dispositif V.I.E. Depuis le Covid, nous avons d’ailleurs instauré des rencontres et des événements entre V.I.E et conseillers. Nous sommes présents aussi en les accompagnant pour la période qui suit cette expérience.
Parmi les points noirs, il y a notamment le coût de la vie et une politique d’immigration restrictive. Pensez-vous que cela puisse nuire à l’attractivité de Singapour auprès des entreprises françaises ?
Singapour opère par phase. De 1998 à 2001, lors de mon premier séjour lorsque je travaillais alors pour l’opérateur de télécommunication local Singtel, Singapour était dans une phase de grande ouverture et les étrangers y étaient accueillis à bras ouvert. Aujourd’hui Singapour est dans une phase plus sélective concernant les talents qu’elle cherche à attirer. À cela s’ajoute le coût de la vie, préoccupation numéro un des Singapouriens et des étrangers aujourd’hui. Singapour risque donc de devenir moins attractive auprès des jeunes en premier lieu. À terme, cela risque d’engendrer des changements d’organisation des entreprises étrangères qui, pour certaines ne vont pas avoir d’autre choix que de réduire leurs équipes à Singapour et embaucher des talents dans d’autres pays de la région comme en Malaisie ou en Thaïlande par exemple. Il faut que Singapour garde son attractivité et son dynamisme économique car elle ne peut exister sans les entreprises étrangères.