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« Des pays cibles ont été identifiés pour développer le réseau » (directrice générale de l’AEFE)

Directrice générale de l’AEFE depuis l’été 2023, Claudia Scherer-Effosse évoque, pour le Journal des Français à l’étranger, sa feuille de route et les leviers dont l’agence dispose pour poursuivre l’objectif Cap 2030 qui vise à atteindre les 700 000 élèves dans le réseau en 2030.

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Claudia Scherer-Effosse nommée à la direction de l’AEFE

Français à l’étranger : Vous avez été nommée cet été à la tête de l’AEFE. Quelle est la feuille de route qui vous a été confiée ?

Claudia Scherer-Effosse : J’ai été nommée en juillet 2023, un moment particulièrement propice pour arriver à la tête de l’agence. En effet, à la suite de consultations menées auprès des acteurs du réseau pendant tout le premier semestre, une feuille de route avait été présentée début juillet par mon prédécesseur Olivier Brochet. Celle-ci définit différents axes pour favoriser le développement du réseau dans le cadre du Cap 2030, fixé par le chef de l’État dès 2018 et qui vise à doubler le nombre d’élèves scolarisés dans le réseau d’ici à 2030.

Cette feuille de route est organisée autour de cinq axes : renforcer l’attractivité du produit éducatif, mobiliser les acteurs de terrain avec des objectifs partagés, développer un vivier de professionnels formé et adapté aux pays concernés, garantir la qualité et la rendre lisible, adapter le pilotage de l’AEFE au futur réseau 2030.

Le Cap 2030 reste-t-il un objectif atteignable dans le contexte géopolitique actuel qui a vu éclater plusieurs conflits ?

Depuis que cet objectif a été fixé, l’AEFE a dû faire face à différents obstacles à commencer par la pandémie de Covid. Cette crise sanitaire mondiale a nécessité une adaptation dans l’urgence de l’enseignement à distance. Aujourd’hui, nous tirons les bénéfices de cet apprentissage à marche forcée et avons acquis une agilité de réaction, notamment en crise de géopolitique. Après les attentats du 7 octobre 2023, les établissements en Israël et dans les territoires palestiniens ont ainsi rapidement pu proposer l’enseignement à distance pendant les semaines qui ont suivi. Les établissements ont depuis rouvert.

L’adaptation n’est néanmoins pas toujours possible dans les cas les plus extrêmes : notre établissement au Soudan a par exemple dû fermer, tandis qu’en Russie et en Ukraine les effectifs ont beaucoup baissé. A Kiev, les élèves sont passés de près de 500 à une soixantaine pendant la première année de l’invasion russe. Signe que les Ukrainiens ont appris à vivre avec cette guerre, les inscriptions sont reparties à la hausse cette année : le lycée Anne de Kiev a accueilli 150 élèves à la dernière rentrée, après des travaux mis en place pour garantir la sécurité des élèves et des personnels (abris notamment). Enfin, au Niger où nous avions un établissement en gestion directe, l’enseignement à distance a été imposé dès la rentrée dernière puisque les personnels ne pouvaient pas revenir sur place. Le nombre d’élèves a donc été divisé par trois. Une mise en veille de l’établissement a été décidée pour la rentrée de septembre 2024. Cela a été annoncé aux familles le 6 février 2024.

Dans ce contexte, certaines zones sont-elles plus dynamiques que d’autres ?

Oui, sachant que nous enregistrons une légère croissance à la rentrée 2023 : le réseau compte aujourd’hui plus de 392 000 élèves avec une hausse annuelle de 1,2%. Cette croissance se concentre surtout dans certaines zones, notamment en Amérique du Nord, en Asie et au Liban. Concernant le Liban, il s’agit en majorité d’établissements qui demandent leur homologation. Cette année, nous sommes par ailleurs passés de 138 à 139 pays dans le réseau, avec un établissement du Monténégro qui nous a rejoint.

Dans le cadre de notre feuille de route, des pays cibles ont par ailleurs été identifiés pour développer le réseau : l’Arabie Saoudite, les Émirats arabes unis, l’Égypte, la Côte d’Ivoire, le Sénégal, le Nigeria, la République démocratique du Congo, l’Inde, le Brésil, le Mexique et les États-Unis. Parmi eux, certains pays sont particulièrement en demande, d’autres -comme l’Inde ou le Brésil- sont ciblés pour leur densité de population sachant que le réseau y est encore très peu implanté. Sept experts travaillent ainsi depuis Paris sur des études de marché, en lien avec les postes diplomatiques de ces pays, pour proposer sur place une offre éducative adaptée.

Lors de vos vœux 2024, vous avez évoqué le « nouveau schéma pluriannuel de stratégie immobilière » : de quoi s’agit-il ?

L’agence dispose de 63 établissements en gestion directe à travers le monde et elle est propriétaire d’une bonne partie d’entre eux. L’entretien et la gestion de ce patrimoine sont donc encadrés par un schéma pluriannuel défini sur cinq ans. Une discussion est en cours avec le ministère de l’Europe et des affaires étrangères pour définir le montant qui sera adossé à ce nouveau schéma et donc consacré à l’investissement permettant de mener à bien les travaux indispensables dans ces établissements. Pour chacun d’entre eux, il y a des enjeux de sécurité, d’adaptation au développement durable ou encore d’attractivité.

La subvention octroyée à l’agence est en augmentation cette année puisqu’elle passe de 447 à 455 millions d’euros pour 2024 : à quoi vont servir les fonds supplémentaires (8 millions d’euros) ?

Plus de 70% du budget total de l’agence est alloué à la masse salariale car nous rémunérons aussi bien les personnels détachés de l’Éducation nationale que ceux qui signent des contrats locaux dans les établissements en gestion directe. Le gouvernement a mis l’accent ces derniers mois sur la revalorisation du métier d’enseignant et cela passe notamment par une augmentation de la rémunération. Nous devons nous aligner et les fonds supplémentaires vont donc servir à cela. La formation aussi est un axe important du budget, notamment depuis l’ouverture des seize instituts régionaux de formation début 2023. Le nombre de personnels qui a suivi une formation est ainsi passé de 8500 (2021-2022) à 12 000 l’année scolaire suivante. Tous les personnels sont concernés : enseignants, documentalistes, infirmiers, personnels administratifs, etc. Les retours sont globalement très positifs.

L’Éducation nationale fait face à une crise de recrutement. Cela se répercute-t-il sur l’AEFE ?

Nous constatons en effet un certain nombre de refus de détachement. Nous avons régulièrement des personnels de l’Éducation nationale qui candidatent auprès de nous, sont sélectionnés mais se voient refuser leur détachement par leur académie. Car, dans l’Éducation nationale, les personnels candidatent avant de savoir si leur hiérarchie va accepter ou non leur départ. Ces refus émanent surtout d’académies qui connaissent une situation de tension en termes de recrutement. Cette tension est particulièrement forte dès qu’il s’agit des professeurs des écoles.

Pour nous, cela débouche sur une situation où un certain nombre de postes restent vacants : il y en avait 200 à la rentrée 2023. Cela n’est néanmoins pas seulement dû aux refus de détachement, il y a aussi des questions de calendrier avec des postes qui se libèrent trop tard par exemple.

Certains enseignants recrutés en contrat local subissent de plein fouet une inflation parfois record. C’est le cas en Argentine où vous avez été ambassadrice. Comment l’AEFE et l’Etat agissent-ils pour pallier ce problème ?

L’Argentine est un cas particulier puisque le pays est empêtré dans une spirale inflationniste. Il y a des ajustements de salaires permanents mais qui sont vite insuffisants puisque les prix ne cessent d’augmenter. Ailleurs dans le monde, l’épidémie d’inflation généralisée a impacté les établissements français de l’étranger car les personnels en contrat local ont tous demandé une augmentation des salaires. Dans beaucoup de pays, il y a un système « coût-vie » qui permet d’ajuster le niveau des salaires à l’inflation chaque année. La limite est souvent liée au fait que les parents d’élèves ne peuvent pas accepter des hausses trop élevées de frais de scolarité.

Le sujet du harcèlement scolaire est une priorité pour le ministère de l’Éducation nationale. Quel dispositif est mis en place au sein du réseau AEFE pour lutter contre ce fléau ?

D’abord, la question du bien-être des élèves a été rajoutée dans les critères d’homologation après la consultation menée en 2023 auprès des acteurs du réseau, ce qui montre que le sujet est aujourd’hui crucial pour notre agence. Nous travaillons ensuite avec l’Éducation nationale au déploiement du dispositif Phare, un plan global de prévention et de traitement des situations de harcèlement mis en place en 2021. Nous mettons par ailleurs à la disposition de nos établissements les « enquêtes climat scolaire » qui permettent d’évaluer les comportement pouvant altérer le climat scolaire. Des formations sont également mises en place pour les personnels afin qu’ils puissent détecter, sensibiliser et traiter les situations de harcèlement lorsqu’elles sont identifiées. Les établissements n’ont néanmoins pas attendu tous ces dispositifs pour agir : beaucoup disposaient déjà de leurs propres outils.

Un autre enjeu important pour l’AEFE est l’accompagnement des élèves à besoins éducatifs particuliers : de quels outils disposez-vous pour les accompagner ?

Les élèves à besoins éducatifs particuliers représentent 9,2% des effectifs du réseau. Une partie de ces élèves, lorsqu’ils sont de nationalité française et en situation reconnue de handicap, bénéficie d’une aide financière de notre part pour financer les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) qui sont à leurs côtés pour favoriser leur autonomie d’apprentissage. Pour financer cela, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères nous confie un budget annuel de 1,5 million d’euros. Ce dispositif était initialement réservé aux élèves boursiers. Depuis septembre 2021, il a été étendu et le Quai d’Orsay a donc augmenté l’enveloppe dédiée à cette aide. 332 familles en bénéficient aujourd’hui.

En matière de suivi, nous avons mis en place un dispositif, Qualinclus EFE, pour que les établissements puissent évaluer leur capacité à accueillir ces élèves. Au niveau central de l’agence, un observatoire des élèves à besoins éducatifs particuliers existe par ailleurs depuis 2016 : il regroupe des personnels et des parents d’élèves qui travaillent à identifier et promouvoir les meilleures pratiques sur ce sujet.

Dans quelle mesure l’AEFE va-t-elle être associée à l’organisation du Sommet de la Francophonie qui se tiendra en France en octobre prochain ?

Par nature, l’AEFE est un opérateur de promotion de la francophonie et qui agit au quotidien en ce sens. L’organisation de ce sommet va donc mettre en valeur notre réseau tandis que, de notre côté, nous allons nous faire l’écho de cet événement grâce à tous nos établissements présents partout dans le monde. Tous nos événements prévus cette année vont par ailleurs avoir une coloration liée à la francophonie.

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