Français à l’étranger : Pourriez-vous vous présenter, ainsi que votre entreprise ?
Kamel Dinar : J’ai fondé Covaly en 2019 à Montréal. Il s’agit d’une application de management que nous proposons aux entreprises, qui permet d’établir un profil de compétences des employés. Les managers peuvent voir la personnalité des salariés à travers des tests de personnalité, et nous les accompagnons également dans la démarche de poser des questions pertinentes aux membres de leurs équipes. L’objectif de Covaly est d’agir comme véritable assistant pour aider les managers à être coach de développement pour leurs employés.
Vous avez créé Covaly au Canada, et plus spécifiquement au Québec : pourquoi ce pays ?
J’ai fait une partie de mes études à Chicago, puis j’ai été expatrié à Dallas : j’avais donc déjà une certaine connaissance de l’Amérique du nord. Je me suis rendu compte que le fait de s’établir à l’étranger – ne serait-ce qu’un an – permet d’apprendre énormément de nouvelles cultures, d’autres méthodes de gestion. J’ai donc décidé de poursuivre l’aventure dans un autre pays et j’ai choisi de m’installer à Montréal.
Pourriez-vous nous raconter la genèse de la création de votre entreprise ?
Je travaillais comme consultant en management d’équipe et de projets et je me suis rendu compte que ce qui manquait réellement aux managers c’était de bien connaître leurs employés. C’est ce qui m’a donné l’idée de créer cette application. J’ai travaillé pendant quelque temps en tant qu’ingénieur, et j’ai eu pour responsabilité de gérer des équipes, et j’ai réalisé que gérer les êtres humains était très compliqué. Mon idée de départ était donc d’aller chercher de bonnes recettes un peu partout, comme aux États-Unis et au Canada. En me concentrant sur le sujet, j’ai réalisé combien il était crucial de bien connaître ses employés d’où l’intérêt d’établir des profils de compétences. Au fond, cela repose sur des valeurs d’entraide, car la performance financière, la croissance c’est bien, mais c’est aussi important de faire grandir les gens avec lesquels nous travaillons.
Quelles difficultés avez-vous rencontré ?
Pour entreprendre au Québec, il faut savoir créer du lien sur le long terme. Ils demandent souvent des références, si l’on a déjà travaillé avec des gens qu’ils connaissent, etc. Il ne suffit pas d’arriver seulement avec une bonne idée : même si les produits ou services proposés sont moins chers et plus performants, ils préfèrent généralement passer par quelqu’un qu’ils connaissent.
C’est pourquoi, le plus simple est de se rendre à la Chambre de commerce et d’industrie française au Canada, car c’est là que se crée le premier réseau. Cela permet de rencontrer des entrepeneurs français qui peuvent mettre en contact avec les bonnes personnes et aider à comprendre la culture commerciale locale. Il existe plein de réseaux d’affaires comme le réseau des femmes d’affaires du Québec, la jeune chambre de commerce de Montréal etc. Je recommande également de demander à ses propres clients – dès que l’on en a – des conseils, généralement ils aident volontiers.
Où en êtes-vous aujourd’hui ?
Actuellement, je suis entre la France et le Canada. Cela me permet de développer Covaly en France, car 80% de nos clients sont Québecois, mais nous travaillons également à toucher les régions anglophones du Canada : nous avons lancé au premier trimestre 2024 une version anglophone de l’application. Nous avons également noué des partenariats avec des entreprises en innovation RH, en coaching, en création de test de personnalité etc. Nous travaillons conjointement à établir des solutions complémentaire et pertinentes.
Quels sont les avantages du Canada pour entreprendre ?
Montréal est ma seule expérience dans l’entreprenariat mais ce dont je peux attester, c’est qu’il est très simple de monter une affaire à Montréal. Cela se fait dans la demi-journée : il suffit de se rendre au registre des entreprises du Québec, présenter le type de société que l’on souhaite créer puis l’administration nous attribue un numéro et il est possible de facturer quasiment le jour même auprès de ses clients. Ensuite je dirais que le fait que le Québec spécifiquement soit francophone rend les choses beaucoup plus facile pour un Français, même s’il est absolument nécessaire d’y être installé et bien intégré pour commencer à faire du business. Dans ces conditions, les Québécois sont très bienveillants et accueillants.
Est-ce un pays où les entrepreneurs français sont solidaires entre eux ?
Les entrepreneurs français, il faut aller les chercher dans un premier temps mais lorsqu’on leur demande de l’aide ils sont disponibles. J’ai rarement vu quelqu’un dire qu’il n’avait pas le temps pour des conseils. Il ne faut pas hésiter à solliciter. Personnellement je ne l’ai pas assez fait au début et c’était une erreur. Il est important de valider son idée de départ avec des gens sur place. Je donne moi-même des conseils à des entrepreneurs qui veulent se lancer ou à des start-ups dans des accélérateurs comme le MT Lab, la société économique de l’Ontario, Startup Montréal où j’ai été lauréat en 2022. Quand ces écosystèmes me demandent de l’aide, c’est avec plaisir.